Nous sommes le 17 juin 2008. Les Lakers sont menés de 14 points alors qu’il reste qu’une minute à jouer dans ce Game 6 des finales NBA. Encore un duel entre Los Angeles et Boston, Gasol et Kobe sont confrontés au big three des Celtics. On commence à sauter de joie dans les gradins de la TD Bank Arena de Boston, Paul Pierce ne peut plus s’empêcher de sourire et KG prend conscience qu’il va devenir champion NBA après des années de galère en playoffs avec ses Timberwolves. Dans le même temps, Kobe, mâchoire serrée et lèvre inférieure légèrement sortie perd pour la deuxième fois en finales NBA, lui qui a été élu MVP de la saison régulière et qui avait à coeur de prouver à toute la ligue qu’il était capable d’aller chercher une bague en étant le leader de l’équipe, sans Shaq à ses côtés. Kobe quitte le parquet et l’enceinte de la salle, déçu mais pas abattu. Il arrive alors en conférence de presse, déjà tourné vers la prochaine saison, et nous fait comprendre qu’il va bosser tout l’été sur son jeu afin de préparer la saison prochaine. Et le moins que l’on puisse dire, c’est que Kobe était bel et bien prêt pour cette saison 2008-2009 puisqu’il portera les Lakers à la première place de la conférence Ouest avec 65 victoires pour seulement 17 défaites. Kobe jouera les 82 matchs de la saison et malgré de nombreuses blessures, il rendra alors une excellente copie avec 26,8 points 5 rebonds et 5 passes décisives. Surtout, Phil Jackson l’économise afin de la garder frais pour les playoffs.
Les Playoffs débutent et les Lakers se retrouvent face au Jazz de Utah, les deux premiers matchs sont maîtrisés sans trop de problèmes et, même si les Angelinos laissent échapper le Game 3, les deux autres matchs ne sont plus qu’une formalité. Les deux prochains adversaires ont clairement donné du fil à retordre aux Lakers puisque les Rockets vont pousser les joueurs dans leurs retranchements avec un Game 7. Kobe est un peu maladroit sur la série, bien défendu par Ron Artest (Metta World Peace pour les intimes), mais Gasol est, lui, impeccable et fait un gros chantier à l’intérieur. Le Game 7 est dominé de bout en bout par les Lakers qui s’imposent 89-70 et accèdent ainsi au prochain tour. En finales de conférence ce sont les Nuggets de Carmelo Anthony et Chauncey Billups qui se dressent sur leur route. Sur cette série, Melo est en feu. Mais la température monte, Kobe élève alors son niveau de jeu en nous gratifiant de plusieurs performances à plus de 40 points et un game 6 à 35 points à 12 sur 20 au tir. Denver n’aura rien pu faire. Le revoilà donc en finales NBA, un an après avoir perdu face aux Celtics en 6 matchs. Cette année-là, ce ne sera pas Boston que les Lakers affronteront, mais bien le Magic d’un Dwight Howard au sommet, alors le pivot le plus dominant de la ligue (difficile à croire aujourd’hui).
Les Lakers ne vont pas faire dans la dentelle lors de ces finales et récitent littéralement leur basket. C’est Kobe Bryant qui prendra alors les choses en main pour apporter la victoire à son équipe. Shoots à mi-distance, pénétrations dans la raquette, fade away, pump fake, turn around, etc. Bryant, en feu, nous montre l’intégralité de sa panoplie offensive. La trentaine révolue, on se rend compte que le jeu de Kobe a véritablement évolué. Moins virevoltant, mais toujours capable de s’élever, le Black Mamba joue de plus en plus dos au panier et quelle élégance, quelle efficacité. Il semble intouchable, et le collectif des Lakers fera clairement la différence face au Magic de Dwight, réduit au silence par les intérieurs Angelinos. Kobe attaque ces finales par un match à 40 points, malgré la défense de Mike Pietrus, il joue en véritable leader, plus concentré que jamais. Comme dirait Mike Breen « he’s got that look », et on sait ce que ça signifie quand il active le mode Black Mamba.
Pour chacune des rencontre de ces finales 2009, nous avons sélectionné une action marquante du numéro 24 :
Lors du premier match, Bryant se focalisera sur les tirs à mi-distance, notamment un fade away sublime sur Pietrus. Dos au français, il l’enfonce. Il reste alors 11 secondes sur la possession et l’arrière manque de perdre la balle, mais récupère celle-ci. Il enclenche un dribble sur sa droite, c’est une feinte, mais Pietrus ne bronche pas. Le mamba se met de dos, feinte sur la gauche et finalement un turn around sur la droite… Ficelle !
Le deuxième match est plus serré et le Magic va pousser les Lakers jusqu’en prolongation. Bien évidemment, Kobe est le principal marqueur de son équipe en overtime, mais au-delà du scoring, il fait également preuve de beaucoup d’altruisme sur toute la rencontre, en témoignent ses 8 passes décisives. Alors qu’il reste une minute à jouer, Kobe tient la balle entre ses mains. La prise à deux des joueurs du Magic arrive sur le Mamba qui déclenche un dribble pour pénétrer dans la raquette et fixe bien Howard qui en vient à oublier de couvrir Pau Gasol. Bryant ne passe pas à côté de l’occasion de servir son coéquipier espagnol d’une passe dans un trou de souris au lieu de prendre un shoot difficile, Gasol monte direct au cercle et met un lay-up, avec la faute, et nous gratifiera d’un cri qu’on a pu entendre jusqu’à Barcelone. Ce panier donnera un avantage de 5 points aux Lakers qui remporteront la rencontre.
Malgré la défaite au Game 3, Kobe a littéralement martyrisé Mike Pietrus. L’action à retenir de ce match est sans aucun doute le trois points sur la tête du français. Il reste 30 secondes de jeu sur la possession en fin de premier quart-temps, à 27 partout. Andrew Bynum est au poste, mais rejoue avec Kobe qui se dégage bien du marquage de Pietrus, se place à 45° derrière l’arc, place une feinte et fait sortir le français de ses appuis, enclenche son shoot et fait mouche. On débute à peine la rencontre que l’arrière du Magic semble déjà exaspéré. Cette action témoigne de la domination de Kobe sur ces finales.
Les Lakers vont être mis en difficulté lors de la quatrième rencontre, ils seront même menés de 12 points. Mais les hommes de Los Angeles ne lâcheront rien et finiront revenir au score. Alors qu’il reste 39 secondes à jouer, Rashard Lewis tente un tir ouvert pour étendre l’avantage de son équipe à 7 points, mais manque son shoot. Derek Fisher récupère le rebond et s’empresse de faire la passe à Kobe qui court vers le panier du Magic. Il dribble et enclenche un spin move, probablement pour aller au lay-up, alors qu’il sent Howard revenir comme une furie dans son dos. Mais, intelligemment, et en plein spin-move, le Black Mamba fait une passe magnifique à Gasol qui arrive en trailer et se retrouve seul face au panier alors que Kobe a feinté la défense du Magic. Les Lakers reviennent à 3 points et, sur un gros shoot de Fisher, forceront les prolongations pour finalement assurer la victoire à l’expérience.
La franchise californienne ne laissera pas filer l’occasion de terminer le Magic à Orlando. Kobe marquera alors 30 points dans ce game 5 et montrera, en une action, que personne sur le terrain ne peut l’arrêter, pas même Dwight Howard. Au Milieu du troisième quart-temps, les Lakers mènent de 9 points et la balle est dans les mains de Kobe qui est défendu par Courtney Lee. Il reste 6 secondes sur la possession, en position de triple menace, il enclenche un dribble sur sa main gauche, rentre dans la raquette et s’élève. Les 2m11 de Dwight se dressent devant lui pour lui barrer la route, mais Bryant, alors en l’air, ajuste son bras pour éviter le contre de Superman et tente un tir en total déséquilibre. Le ballon rentre, Kobe termine au sol. Il vient de montrer l’étendue de son talent et de sa détermination dans ce shoot impossible.
Il tournera à 32,4 points par match sur les finales et sera naturellement élu MVP. Plus que cette récompense individuelle, c’est le fait de remporter le titre qui sera particulièrement symbolique pour la carrière de Bryant. Lui qui a été tant critiqué sur ses performances de 2004 à 2007, alors qu’il était bien seul dans l’effectif des Lakers. Lui, qu’on disait dépendant de Shaq pour gagner un titre, vient de remporter une nouvelle bague en étant le leader incontesté de son équipe.
Photo : Harry How/Getty Images