Peu importe l’angle sous lequel on le regarde, que ce soit par le prisme politique ou sportif, Madrid et Barcelone seront toujours opposés. D’abord ennemis jurés à travers le football, le basketball ne fait pas exception à la règle et le clasico fait toujours figure d’évènement immanquable pour les fans. C’est le match à ne surtout pas perdre. Il en va de la fierté d’un club, de son peuple et de son histoire. À l’occasion du match qui oppose le FC Barcelone et le Real Madrid ce soir en Euroleague, L’Analyste revient sur cette confrontation historique.
L’origine d’une rivalité
Si les deux géants du sport espagnol sont historiquement liés par leurs affrontements sur le grand rectangle vert, la rivalité entre les deux villes est avant tout liée à des aspects politiques. Sous le régime du général Francisco Franco (1936 – 1975), la ville de Madrid officiait comme le siège d’un gouvernement que Franco voulait comme forte et unitaire. Barcelone représentait elle, la lutte pour l’indépendance. La situation politique est aujourd’hui différente de celle qu’elle aurait pu être par le passé, mais le clasico conserve ces sources de tensions politiques.
Les premières rencontres sportives entre les deux équipes commencent au début du XXème siècle et plus précisément en 1902 lors d’un match de football. La rivalité ne va connaître sa naissance qu’à partir de la première saison de Liga en 1928/1929. Le FC Barcelone remporte ce premier titre après une lutte acharnée tout au long de la saison face aux madrilènes. Une rivalité était née, et il était hors de question de laisser la moindre part de gâteau au rival, quel que soit le sport.
Les débuts du clasico sur un terrain de basket
Il aura fallu attendre 1957 pour voir le Real Madrid et le FC Barcelone s’affronter sur un terrain de basket. Appartenant aux mêmes propriétaires que les équipes de football, il est inconcevable de ne céder quoi que ce soit à l’ennemi. Le clasico se joue partout et c’est qui a permis l’ascension de grands joueurs au sein des deux équipes. C’est donc le 13 avril 1957, dans l’antre du Frontón Fiestalegre (ancienne salle du Real Madrid), que les deux clubs s’affrontent. Le Real Madrid en sort vainqueur 73-55 et marque le début d’une domination à outrance de ces derniers.
En 1961, le club de Barcelone est démantelé, mais sous la pression des supporters il renaît dès 1962 et sera de retour en première division en 1966. Un retour marqué par 16 défaites en 18 matchs contre le Real Madrid. Une grande partie de cette domination revient au crédit de l’entraîneur Pedro Ferrándiz, qui a entraîné les Merengues entre la saison 1959/1960 et la saison 1974/1975. Il est l’entraîneur qui a remporté le plus de titres avec Madrid.
À cette époque, les meilleurs joueurs espagnols souhaitent tous porter la tunique du club de la capitale. Des joueurs comme Clifford Luyk, Carmelo Cabrera, Vicente Paniagua ou Wayne Brabender ont illuminé les clasicos côté madrilène. Une classe et un talent paraissant insurmontable pour le FC Barcelone à l’époque. Les catalans se contentent de quelques victoires dans leur antre du Palau Blaugrana sans arriver à gagner à Madrid. Durant cette période, les madrilènes règnent également sur la scène continentale, en remportant 7 titres de champions d’Europe, trophée autrefois appelé : Coupe d’Europe des clubs champions.
Dans les années 80, la montée en puissance de Barcelone
L’année 1979 marque le début d’un tournant. Les cùlers réussissent l’exploit de battre le Real Madrid à domicile. Il est retentissant et marque le début de l’ascension des catalans dans les années 80. Les duels sur et en dehors du parquet apparaissent comme mémorables. À la tête de leurs équipes se trouvent Lolo Sáinz sur le banc madrilène (deuxième coach le plus titré de l’histoire du Real Madrid) et Aíto García Reneses du côté barcelonais, connu pour être l’un des meilleurs coachs espagnols de tous les temps.
Des joueurs de classe mondiale rayonnent durant ces matchs intenses et épiques. Pour n’en citer que quelques-uns, on retiendra les noms de Fernando Martín ou Drazen Petrovic pour le Real Madrid et Epi ou Audie Norris pour le FC Barcelone. C’est-à-dire l’un des meilleurs duels qui aient été joués dans l’histoire du basket européen.
Barcelone réussi à briser l’hégémonie du Real Madrid des années 1960 et 1970 et réussi à soulever son premier titre de champion en 1981. Au cours de cette décennie, l’équipe de Barcelone remporte un total de cinq titres, ce qui fait perdre au Real Madrid l’exclusivité des trophées qu’il détenait depuis la création de la ligue nationale.
Malgré sa domination, Barcelone se heurte aux dernières marches européennes
Les années 1990 sont dans la continuité de l’équipe bâtie jusqu’alors. Elle remporte ainsi quatre titres nationaux et deux Coupes du Roi. Mais le titre européen lui échappe toujours, malgré 4 apparitions en finale : en 1990, 1991, 1996 et 1997. La déception est autant plus grande lorsque le rival madrilène remporte son huitième titre de champion d’Europe en 1995 grâce à l’arrivée de la future superstar Arvydas Sabonis et d’un jeune entraîneur déjà vainqueur de l’Euroligue à deux reprises avec deux clubs différents, Željko Obradović.
L’avènement de Pau Gasol à la fin de la décennie fait penser au club qu’il pourra enfin prendre un titre européen afin de pallier ce manque qui entache sa réputation face au Real Madrid. Après une finale remportée en 2001 face aux madrilènes, il s’envole pour la NBA, sans arriver à porter le club sur le toit de l’Europe.
La décennie 2000-2010 : La consécration pour Barcelone, Madrid n’y arrive plus
Sur la scène européenne comme nationale, les deux clubs ne jouissent pas du même succès. En championnat national, on ne retrouve plus un seul face à face entre les deux équipes en finales. En euroligue, qui débute son « ère moderne » avec l’adoption d’un nouveau format à partir de la saison 2000-2001, le Real Madrid n’apparaitra pas une seule fois en finale. Pour Barcelone au contraire, ces années sont les bonnes.
L’équipe, composée entre autres de Dejan Bodiroga, Šarūnas Jasikevičius et Juan Carlos Navarro vient à bout du Benetton Trévise 76-65, et devient championne d’Europe, chez elle, au Palau Sant Jordi de Barcelone en 2003. Elle récidive, 7 ans plus tard, dans l’arène de Paris Bercy. Après avoir dominé outrageusement la saison européenne en enregistrant une seule défaite, le Barça vient à bout de l’Olympiakós Le Pirée en finale de l’Euroligue sur le score de 64 à 54 après avoir dominé le CSKA Moscou en demi-finale. Juan Carlos Navarro avec 24 points lors de la finale est élu MVP du Final Four.
De 2011 à aujourd’hui : La génération dorée puis la nouvelle génération
Ces années sont marquées par la « génération d’orée » espagnole dont la majorité des joueurs jouent dans les deux camps. Sergio Llull, Rudy Fernandez, Felipe Reyes, Sergio Rodriguez côté merengue et Juan Carlos Navarro, Victor Claver, Pau Ribas ou encore Victor Sada côté catalan.
Dans cette période, quasiment aucuns titres nationaux n’échappent aux deux clubs qui se retrouvent quasi-systématiquement en finale, que ce soit pour la supercoupe d’Espagne, la coupe du roi, ou le championnat d’Espagne. Le Real Madrid remportera même deux autres Euroleague (2015 et 2018), portant leur total à 10, bien devant les deux du FC Barcelone. Ces duels mettent également en lumière les pépites qui partiront ensuite pour la NBA à l’image de Tomas Satoransky, Mario Hezonja, Usman Garuba ou encore le plus connu d’entre tous : Luka Doncic.
À la retraite de son joueur emblématique Juan Carlos Navarro, surnommé la Bomba, le FC Barcelone eut quelques années compliquées. Mais c’est sans compter un recrutement en grande pompe que les catalans sont de retour aux sommets. Avec Nikola Mirotic, Alex Abrines, Tomas Satoransky revenus de NBA, des stars d’Euroleague à l’image de Jan Vesely, Cory Higgins ou encore Sertac Sanli, le FC Barcelone compte bien reconquérir les sommets de l’Europe.
En face, le Real Madrid a construit une véritable armada avec Walter Tavares en chef de file, bien accompagné par Mario Hezonja, Dzanan Musa, Guerschon Yabusele ou encore les vétérans de toujours que sont Sergio Llull, Sergio Rodriguez ou Rudy Fernandez.
Après la débâcle en demi-finale d’Euroleague l’an dernier, la perte du titre de champion d’Espagne et la défaite en Supercoupe d’Espagne, le FC Barcelone fait des cauchemars de son rival madrilène. Les cùlers auront à cœur de s’imposer devant son public ce soir afin de lancer leur saison en Euroleague tout en faisant descendre le Real Madrid de son piédestal. Une chose est sûr, ce clasico sera encore une partie dont l’histoire se souviendra. Coup d’envoi 20h30.