Les Pelicans à l’épreuve de Zion Williamson

par Paul Roy

L’arrivée de Zion Williamson ayant suivi sans délai le départ d’Anthony Davis, les fans des Pelicans n’ont pas eu le temps de s’inquiéter. Alors que l’élu porte tous les espoirs de sa fanbase depuis deux saisons maintenant, New Orleans n’a encore atteint aucun résultat — ce qui n’a rien d’anormal, puisque le projet en est encore à ses débuts.

Cependant, dans une ligue où la tendance est à la victoire immédiate et aux demandes de transfert, les Pelicans s’empresser de mettre leur prodige sur la route du succès, au risque de le perdre tôt ou tard. L’équipe dispose déjà d’éléments intéressants qui pourraient lui permettre d’obtenir des résultats dès la saison prochaine, mais le conditionnel est de mise.

2020-21 : Déjà le début de la fin ?

Tout le monde se rappelle de la décision d’Anthony Davis de quitter la franchise, car à l’époque, le front office n’avait pas réussi à entourer sa jeune star pour lui permettre de briller. Même si AD avait été élu 5 fois All-Star et affichait des statistiques de 23,7 points de moyenne et 10,5 rebonds, l’ailier n’avait pu goûter que deux fois à une campagne de playoffs. Après son extension rookie, le choix était donc logique : quitter le bayou pour la Cité des Anges. 

Vous allez nous demander : en quoi la décision d’Anthony Davis pourrait être un tournant dans la franchise en sachant qu’ils ont réussi à récupérer Zion Williamson la saison suivante ? Eh bien parce que la NBA a changé depuis et les jeunes joueurs sont de plus en plus impatients de se retrouver dans des équipes compétitives très rapidement. De plus, Zion n’a jamais vraiment caché son envie de briller. Toujours tout, très vite. 

Là encore, une question se pose. Avec Brandon Ingram à ses côtés, Zion a un joueur de qualité, mais la réalité du terrain est parfois bien différente et ne se résume pas à un joueur, mais à un collectif. Pour preuve, la saison dernière. Nouveau coach pour tenter de créer un électrochoc après les années Alvin Gentry, mais Van Gundy n’a pas réussi à faire cliquer son effectif. Avec un bilan de 31 victoires pour 41 défaites, les Pels n’ont même pas eu la possibilité de participer au Play-In, pourtant créé pour favoriser ce genre d’équipe. 

Après une saison rookie marquée par les blessures, Zion a pris du poil de la bête la saison dernière. 84 % des matchs joués en sachant qu’il se blesse en fin de saison (fracture d’un os de la main, NDLR), l’empêchant de participer aux six derniers matchs. Même si les blessures restent un facteur important en ce qui concerne Williamson, sa saison 2020-21 nous a montré un joueur plus tranchant et surtout d’une polyvalence très intéressante pour son développement futur. 

« Quand Stan Van Gundy est passé en Point Zion, nous avons vu que Zion était historiquement efficace dans ce rôle. Il est le joueur capable de faire à peu près tout sur un terrain. Il fait partie des élus. Il n’y a personne qui a ses combinaisons de capacités. »

David Griffin, Vice-Président des opérations Basket

Le point Zion — à défaut d’être un point d’observation d’un célèbre parc naturel de l’état de l’Utah — est un système développé par Stan Van Gundy dans lequel Zion est plus utilisé dans un rôle de meneur. En tout cas, il dispose de plus de possibilités d’évoluer balle en main dans les systèmes. Bien que son Usage rate soit légèrement en baisse cette saison (-0,7 %), ses passes décisives ont augmenté pour passer de 2,1 à 3,7 par match dès sa saison sophomore.

Plus encore, son impact offensif s’envole avec un Win Share offensif de 7,1 contre 1,5 la saison précédente. Les stats finales de Zion Williamson à la fin de la saison ne laissaient que témoigner du talent du jeune homme d’encore 20 ans qui n’attend qu’à exploser : 27 points, 7,2 rebonds et 61,1 % de moyenne.

Cela ne fait plus aucun doute : Zion Williamson a tout pour devenir l’un des visages de la NBA dans les prochaines années. Photo : Jonathan Bachman / Getty Images

Cependant le reste de l’effectif a été en grande difficulté. Le premier nommé à la barre de la mauvaise saison des Pelicans est Eric Bledsoe. Il faut dire que l’association avec Lonzo Ball après son transfert des Bucks pouvait faire saliver tant la qualité à la mène des deux joueurs est reconnue. Cependant, et malgré une utilisation quasi complète sur la saison avec 29,7 minutes de moyenne, Eric n’a été que l’ombre de lui-même. 12,2 points de moyenne et surtout 3,8 passes. Il faut remonter à son début de carrière chez les Clippers pour retrouver des statistiques d’un tel niveau, c’est-à-dire 9 ans en arrière. 

La défense a également été le point négatif de la mauvaise saison. Seulement 23e équipe avec un rating de 113,3, ils avaient pourtant une bonne option dans la raquette avec Steven Adams ou encore Jaxson Hayes. Mais c’est en défense extérieure que les lacunes auront grandement inquiété les observateurs de l’équipe. 14,5 trois-points réussis en moyenne par leurs adversaires soit le 3e pire bilan de la ligue avec une moyenne de 38,0 % de réussite (26e). 

Sans ressource, New Orleans perd pied petit à petit pour sombrer dans les marécages de leurs espoirs de playoffs. Cependant, l’intersaison aura donné quelques motifs d’espoirs pour la saison prochaine. Mais attention, car si les résultats n’arrivent pas rapidement, un certain Zion pourrait commencer à se lasser du jazz de la Louisiane et pourrait partir faire ses gammes ailleurs. Les Pelicans sont à une étape clé de leur projet Zion qui en cas de nouvel échec pourrait marquer un nouveau tournant dans la franchise voire même pour la NBA. 

Intersaison : Pas de solution miracle

ArrivéesDéparts
Jonas ValanciunasSteven Adams
Devonte GrahamLonzo Ball
Tomas SatoranskyEric Bledsoe
Garrett TempleWes Iwundu
Trey MurphyJames Johnson
Herbert JonesJames Nunnally

Sans trop de surprise au vu de leur situation, les Pelicans ne se sont pas vraiment renforcés pendant l’été. À la Draft, le choix de Trey Murphy, solide 3&D, est certainement très judicieux. Mais ni son arrivée ni celle de Herb Jones ne devrait avoir un grand impact sur le projet des Pelicans. 

L’arrivée de Jonas Valanciunas, un pivot régulier et très productif, est certainement un véritable plus dans cet effectif. Il saura sans doute répéter le même double-double de moyenne qu’avec les jeunes de Memphis — 17,1 points et 12,5 rebonds par match la saison dernière — et ainsi apporter une certaine stabilité au groupe. Il s’agit sans doute d’un upgrade par rapport à Steven Adams.

Compte tenu des exigences salariales de Lonzo Ball, le Front Office des Pelicans a décidé de laisser partir le prometteur meneur qui devait s’associer sur le long terme avec Williamson. Pour compenser, la franchise a offert à Devonte’ Graham un contrat moins ambitieux (12M par saison) tout en veillant à récupérer Tomas Satoransky aux Bulls.

Surtout, dans leurs opérations, New Orleans a bien veillé à libérer du cap pour la Free Agency 2022. En remplaçant Adams par Valanciunas, agent libre l’été suivant, et en se débarrassant de Bledsoe, la franchise a déjà dégagé une certaine marge d’opération. Sachant que Satoransky est libre de tout contrat en 2022 lui aussi, les Pelicans semblent préparer un gros coup. Peut-être une nouvelle star pour satisfaire Zion ?

Facteur X : Comment faire fonctionner le jeu autour de Zion Williamson ?

Si nous avons vu que Zion était capable de prendre le jeu à son compte la saison dernière, c’est au tour du collectif de briller, à commencer par le coach. Fini le projet Stan Van Gundy dès la première année, les Pelicans se tournent désormais Willie Green. Un head coach rookie, passé par Golden State et les Suns ces trois dernières années. Il arrive avec un background de coach avec une ascension express et, surtout, une carrière honorable avec 12 ans dans la ligue en ayant goûté à très peu de campagnes de playoffs — peut-être un signe… 

Willie Green aura la responsabilité de faire fonctionner les joueurs ensemble. Si les postes à l’intérieur et à l’aile semblent être trustés par Zion, Ingram, Valanciunas et Hayes, c’est à l’extérieur que le travail devra se faire et notamment à la mène. Lonzo Ball, pourtant pièce maîtresse au poste, a été envoyé du côté de Chicago. Actuellement, l’équipe compte Devonte’ Graham, Tomas Satoransky, Garrett Temple, Nickeil Alexander-Walker ou Kira Lewis Jr pour prendre ce rôle. Si Graham devrait vraisemblablement prendre la responsabilité de la mène en début de match, Green s’est montré très ouvert à la concurrence lors du Media Day : 

« Je pense que [le training camp, NDLR] sera compétitif. Il y a quelques posts ouverts. C’est une opportunité pour nos arrières d’arriver et de la saisir, de gagner leur place. C’est ce que je veux voir pendant le camp : des mecs qui en veulent. »

Willie Green, Head coach

Graham sort d’une expérience à Charlotte que l’on pourrait qualifier d’inachevée. Lui qui avait tant montré lors de sa deuxième saison a vu un Ball lui passer devant et le réduire à des minutes plus faibles et une confiance au plus bas. Cependant, un rôle de meneur titulaire pourrait le relancer alors qu’il arrive dans la dernière année de son contrat rookie. Même s’il a déjà signé une extension, il peut avoir l’opportunité — pour ne citer que son coach — de retrouver le rôle de sa deuxième saison. Celui d’un joueur titulaire qui peut emmener son équipe vers les sommets en distribuant les caviars pour ses coéquipiers. 

Pour arriver à ses coéquipiers, intéressons-nous maintenant à l’autre pièce maîtresse de l’effectif : Brandon Ingram. Arrivé en rebond suite à une expérience compliquée chez les Lakers, Ingram s’est imposé dans l’effectif comme un joueur clé, notamment lors de l’absence de Zion pour blessure. La saison dernière, il a tenu les mêmes statistiques qui avaient fait de lui un All-Star il y a deux ans, avec 23,8 points à 46,6 % au tir, moins de rebonds, mais plus de passes. En somme, il a permis à La Nouvelle-Orléans de trouver une certaine régularité au scoring et, surtout, de bonnes réactions dans les matchs importants. Même si certains attendaient plus de lui cette saison, le retour dans la rotation de Zion lui a offert moins de ballons et moins de possibilités de faire des nuits avec beaucoup de paniers marqués.

L’explosion de Brandon Ingram a fait le plus grand bien au projet de New Orleans. Photo : Jonathan Bachman / Getty Images

Maintenant, comment faire de tous ces joueurs un collectif ? Si Zion parvient à préserver son physique et s’éloigner des blessures, il devrait sans trop de surprise continuer sur son excellente lancée. Mais l’arrivée d’un nouveau coach et de plusieurs nouveaux joueurs pourrait fragiliser l’alchimie, du moins pendant les premiers matchs de la saison. Et en cas de spirale négative, les Pelicans pourraient se retrouver englués dans une conférence toujours plus relevée.

Le risque est que Zion se lasse du projet Pelicans. Car si Anthony Davis avait donné 7 ans à la franchise, Zion pourrait demander son départ peut-être plus rapidement encore. Les rumeurs autour de son envie de pâturages plus verts — non, on ne parle pas des Celtics — sont bien fréquentes, mais jamais le joueur n’a laissé transparaître son envie d’ailleurs. Notre lecture se fait sur la tendance du win-now en NBA, qui touche toutes les franchises. 

Zion doit être encadré, et par des joueurs de talent, voire des superstars. L’arrivée de Brandon Ingram était clairement la première étape. Le départ de Lonzo Ball était un pas en arrière, dans l’espoir de prendre de l’élan pour 2022. Actuellement dans un entre-deux, il faudra que Devonte Graham mette les bouchées doubles pour pouvoir s’assurer une place dans le cœur de Zion. Le constat est le même pour Valanciunas, qui doit protéger la raquette de la meilleure des manières pour permettre à la défense des Pelicans de briller.

Mais si la superstar se vexe et demande de meilleurs assets, qui pourrait être sur le siège éjectable ? Les agents libres de 2022, comme Valanciunas et Satoransky, sont les premiers sur la liste. Ils devraient logiquement être sacrifiés si les Pelicans ont l’opportunité de ramener une star à La Nouvelle-Orléans.

Les pièces ajoutées cet été sont intéressantes, mais pourrait bien être sacrifiées au profit d’une star. Photo : Raj Mehta / USA TODAY Sports

En cas de crise, Devonte’ Graham, Josh Hart et Jaxson Hayes pourraient bien finir dans un transfert avec quelques picks. La franchise dispose en effet de nombreux choix, notamment cinq lors de la prochaine Draft, sans que ces assets soient assez convaincants pour faire pencher la balance. En 2022, ils possèdent deux premiers tours, ceux des Lakers et des Grizzlies. Jusqu’en 2024, quelques premiers tours, mais peu d’entre eux devraient finir dans la lottery. Et si cela est réellement nécessaire pour satisfaire Williamson, Brandon Ingram devra s’en aller lui aussi. 

Et si on s’exportait loin de la raquette ? 

La saison dernière, les Pelicans ont terminé première équipe NBA en termes de paniers marqués dans la raquette avec une moyenne de 36,5 par match, bien aidés par l’apport de Zion ou encore de Brandon Ingram. Cependant, le vrai objectif pour diversifier leur jeu serait de viser les lignes extérieures. Seulement 25e de la ligue en tirs tentés à trois-points, New Orleans possède là un réel axe d’amélioration, mais les tireurs les plus audacieux ont fait leurs valises vers de nouveaux horizons. 

Lonzo Ball a terminé meilleur tireur extérieur de l’équipe avec une moyenne de 3,1 tirs marqués sur 8,3 pris (37,8 % de moyenne) et plus de 60% de ses tirs tentés venaient en catch-and-shoot. Eric Bledsoe était également une menace extérieure, mais sa régularité fluctuante ne lui a jamais permis de briller sur le parquet du Smoothie King Center. Seulement 1,7 trois-points marqués pour 5,0 tentés par match (34,1 %).

Note intéressante, Zion est le joueur la saison dernière qui a permis à ses coéquipiers de marquer le plus de trois points, mais également d’avoir le plus de tickets de shoot avec une moyenne de 5,0 trois-points tentés depuis une passe de Zion (35,9 % de réussite). Comme quoi, quand on possède un aspirateur à défense dans son effectif, il est toujours bon de lui apprendre à lever les yeux pour un coéquipier ouvert dans le corner. Basketball 101.

Le sens de la passe de Zion Williamson et sa capacité à attirer la défense devraient faciliter le jeu des shooters. Photo : Rick Osentoski / USA Today

Tournons-nous donc maintenant vers le nouvel effectif. Si Zion et Ingram devaient être dans leurs standards extérieurs, Devonte Graham a également une excellente carte à jouer. Shooteur reconnu, il possède une capacité à tirer avec régularité à l’extérieur. Même si son pourcentage fluctue autour des 37 %, une installation dans les meilleures conditions pourrait lui permettre d’avoir plus d’opportunités. Plus encore, là où à Charlotte il se trouvait souvent en première option offensive au sein de l’attaque, il pourrait n’être que 3e chez les Pelicans.

Et avec une défense qui fait moins attention à lui, ses pourcentages pourraient augmenter. Ses statistiques en catch-and-shoot la saison dernière étaient de 42,3% (2,3 3PM) quand elles passaient à seulement 29,4% en pull-up (1,0 3PM). Avec un Zion ou un Ingram balle en main qui monopolisent les défenses, Graham pourrait réellement se transformer. 

Notons également que l’arrivée de Garrett Temple et Tomas Satoransky permettra d’avoir des tickets de shoots extérieurs intéressants. Les deux cumulent 2,0 trois points marqués par rencontre pour une moyenne d’environ 35 %. 

De plus, Valanciunas dispose également d’un tir extérieur qui n’est pas si mauvais à la vue de son gabarit. Même s’ils ont un profil similaire, la différence avec Steven Adams va se faire sur sa capacité à strech et ouvrir encore une fois les défenses pour les pénétrations dévastatrices de Zion ou Brandon Ingram. Ou, au contraire, sur la traction qu’il exerce dans la raquette pour laisser la part belle aux tireurs de l’équipe. Quelle que soit la situation, il permettra à son équipe de respirer grâce à ses multiples qualités offensives.

Avec du travail, les Pelicans peuvent devenir une attaque très intéressante cette saison. Tous les joueurs du 5 de départ ont la capacité de sanctionner à trois points. En cas de non-réussite, il faudra concentrer l’attaque à l’intérieur comme la saison dernière avec comme objectif cette fois-ci d’être efficace des deux côtés du terrain. 

Le 5 de départ potentiel :

  • MJ : Devonte’ Graham
  • A : Garrett Temple
  • AI : Brandon Ingram
  • AF : Zion Williamson
  • P : Jonas Valanciunas

Notre pronostic : 38 – 44 (10e)

Même si les espoirs sont grands, la probabilité pour que la saison des Pelicans tourne à leur avantage est encore trop incertaine. Même si Zion devrait une nouvelle fois faire briller l’équipe, le collectif pourrait avoir du mal à trouver son rythme de croisière. D’autant que si leur début de saison se présente sans trop de difficulté en termes de force du calendrier, la fin sera extrêmement compliquée. À partir de la fin février ils devront affronter les Lakers (3), Phoenix (2), Portland (2), Utah, Denver et les Clippers en 22 matchs. 

Même si Zion est encore dans son contrat rookie, il faudra agir rapidement en cas de mauvaise saison, car on doute que le Golgoth veuille rester dans le marasme du bayou. Malgré cela, il s’est montré rassurant lors du Media Day, assurant vouloir tout donner pour la franchise et pour les fans. Une chose est sûre. Zion sait ce qu’il faut faire en NBA pour continuer à être dans les petits papiers. Une bonne base de travail pour David Griffin et Willie Green pour la saison prochaine, en espérant que la Free Agency 2022 sera fructueuse. 

Photo de couverture : Sean Gardner / Getty Images

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