Pour la huitième année consécutive, les Blazers se sont retrouvés en Playoffs. Et, comme très souvent, ils n’ont fait qu’acte de figuration parmi les puissantes écuries de l’Ouest. Une triste habitude qui a conduit à de nombreux changements durant cette trêve estivale. Pour autant, les leaders de la franchise restent les mêmes. Ceux avec de grandes facultés mais aussi possédant des limites sérieusement questionnées. Cette saison dans l’Oregon est plus que jamais déterminante pour la teneur d’un projet qui a peut-être assez duré.
2020-21 : Encore un échec
Que nous reste-t-il comme souvenirs positifs de la saison des Blazers ? Le shooteraround légendaire de Lillard lors du game 6 contre les Nuggets ? La victoire 141 – 105 face à Cleveland en mai ou encore la palette offensive de Melo sur toute la saison ?
Une chose est sûre, c’est que Portland peut avoir des regrets sur la saison passée. Malgré un talent offensif sur quasiment tous les postes du starting lineup et un apport intéressant du banc, des lacunes évidentes ont pu être notées sur l’intégralité de la saison. Les Blazers débutent la saison avec un Nurkic de retour à 100% après avoir seulement joué les matchs dans la bulle la saison précédente. Carmelo Anthony, avec ses 16 saisons dans les chaussettes, était prêt à accepter un rôle de 3e option offensive. CJ McCollum était toujours présent, bien qu’il apparaissait pourtant à plusieurs reprises dans des rumeurs de transfert. Ou encore Gary Trent Jr. qui avait très largement montré une partie de son potentiel la saison dernière.
Le front office avaient renforcé également le secteur intérieur en recrutant Enes Kanter et Robert Covington pour apporter du rebond et leur énergie. D’autre part, l’organisation décidait de ne pas trop miser sur la jeunesse et choisissait uniquement l’ailier CJ Elleby, drafté en 46e position.
Enfin, Neil Olshey avait décidé de continuer d’accorder sa confiance à Terry Stotts, entamant ainsi sa 9e saison au poste de head coach sur le banc des Trail Blazers. Stotts a été le seul coach de Lillard, et pour le meneur cette relation est importante, un critère déterminant pour lui. En sortie d’une saison 2019-2020 phénoménale, Lillard était attendu pour porter son équipe parmi les cadors de l’Ouest, il a très largement répondu présent tout au long de la saison avec une moyenne à 28.8 points et 7.5 assists et un rôle de leader qu’il assume pleinement pour faire gagner des matchs à son équipe et se montrer clutch comme à son habitude. Alors bien entendu, réussir à se qualifier dans la jungle que constitue la conférence Ouest, n’a rien d’évident et les Blazers réussissent tout de même à se hisser à la 6e place de la conférence grâce un jeu porté sur l’attaque, le 3 points à outrance, les individualités offensives et le leadership de Dame.
Un leadership qui emmène dans son sillage ses coéquipiers dont McCollum, Anthony et Gary Trent Jr. qui apportent tous les trois une moyenne de 51.5 points. Et alors que Trent commence à véritablement s’imposer en attaque en montrant soir après soir une vraie régularité, il se voit transférer du côté de Toronto en échange de Norman Powell qui jouera 27 matchs avec Portland pour une moyenne de 17 points par match. Un apport intéressant pour préparer les playoffs. À l’issue des 72 matchs de saison régulière, les Blazers se qualifient pour les playoffs avec 42 matchs et malgré un Lillard stratosphérique, avec 34.3 points de moyenne dont une pointe à 55 points, le collectif de Denver aura raison des hommes en rouge et noir qui s’inclinent 4-2 dans la série et qui aborde l’intersaison avec des doutes et un besoin de changement comme l’affirmera le GM Neil Olshey qui pointera du doigt Stotts et le manque d’implication défensif de l’équipe. Stotts fait ses valises après 9 saisons sur le banc, un adieu difficile pour Lillard qui postera un message touchant sur sa relation avec son désormais ex-coach. Il est temps de voir l’avenir différemment pour Portland désormais.
Intersaison : Une bande mieux organisée ?
Arrivées | Départs |
---|---|
Larry Nance Jr. | Carmelo Anthony |
Cody Zeller | Harry Giles |
Dennis Smith Jr. | Rodney Hood |
Tony Snell | Enes Kanter |
Ben McLemore | Rondae Hollis-Jefferson |
Patrick Patterson | TJ Leaf |
Marquese Chriss |
Exit donc Stotts et son état d’esprit “tout pour l’attaque” et welcome Chauncey Billups ! C’est sans doute l’arrivée la plus marquante de cette intersaison pour les Blazers. Savant du basket, comme il le prouve sur le plateau de NBA TV, lorsque Chauncey parle, on écoute et on boit ses paroles. On exagère à peine, tant l’homme est respecté au sein de la grande ligue. Ce poste de head coach représentait pourtant bien des discussions dès l’annonce du départ de Terry Stotts. Le premier nom qui est apparu était celui de Jason Kidd, qui a rapidement déclaré son manque d’intérêt de venir coacher les Trail Blazers, puis c’était autour de Becky Hammon et enfin Mike D’Antoni d’être mentionnés.
Pourtant le 26 juin, c’est Shams Charania qui tweet la nouvelle, Billups devient le coach de l’équipe de l’Oregon et quelque part c’est tout à fait logique. Pourquoi logique ? En sortie d’élimination des playoffs Neil Olshey pointe du doigt ce que tout le monde sait déjà, la défense de ses joueurs :
“Nous voulons améliorer notre secteur défensif, engager quelqu’un avec des qualités de leadership, quelqu’un qui saura rendre chaque joueur responsable et impliqué en attaque comme en défense”.
Ainsi, parmi les potentiels remplaçants de Stotts, il apparaît logique de choisir Mr. Big Shot pour apporter cette culture du hustle et surtout de la gagne. Pourtant malgré cette signature que l’on peut qualifier de positive pour les Blazers, des rumeurs font leur apparition concernant l’avenir de Lillard dans l’Oregon. En effet, selon un proche de Dame, le meneur aurait demandé son transfert. Pendant un mois, Lillard est annoncé un coup à Philadelphie, un coup aux Clippers, des rumeurs qui défraient la chronique et qui seront finalement démenties par le meneur six fois All-star. De nouveau, sa loyauté envers l’organisation sera démontrée, lui qui déclare ne se voir nulle part ailleurs qu’à Portland.
D’un autre côté, Lillard attend beaucoup de cette off season pour renforcer l’effectif notamment sur le plan défensif. Mais Portland est un petit marché et ne représente pas forcément une décision attractive pour les agents libres ou de jeunes talents. De plus, Portland ne dispose pas de picks sur le premier tour de draft, ils décident d’arranger un trade pour récupérer le pick des Pelicans en 43e position en la personne de Greg Brown. Un ailier en sortie de l’université de Texas, un joueur capable de marquer des points et qui apporte de l’intensité en défense et Trendon Watford (non drafté). Malgré l’ouverture de la free agency, très peu de joueurs montrent de l’intérêt à rejoindre les Blazers. C’est finalement Cody Zeller, en provenance de Charlotte, qui sera la première recrue de l’équipe pour apporter de la taille et du rebond à l’intérieur. Puis c’est autour de McLemore et Snell de combler le départ de Melo (du moins essayer) et amener de la défense extérieure.
La grosse signature de cette free agency pour les Blazers est celle de Nance Jr. Il a un vrai rôle à jouer dans le secteur intérieur et il sera bien épaulé par les arrivées de Patrick Patterson et Marquese Chriss pour ajouter de la taille et de la rigueur défensive. Enfin, les Blazers concluent leur été par la signature de Dennis Smith Jr. qui est un vrai joueur de basket, ultra athlétique et qui peut constituer un rôle de backup intéressant pour Lillard – en concurrence avec Anfernee Simons. Finalement, compte tenu du marché que représente Portland, ce sont des signatures logiques et qui rentrent plutôt bien dans une philosophie plus polyvalente et défensive de l’équipe.
Redonner du corps à tous les aspects du jeu
La signature la plus importante de l’intersaison des Blazers, le véritable Facteur X, on ne parle pas de Tony Snell, mais bien de l’arrivée Chauncey Billups à la tête du banc de Portland. Comme cela a été mentionné dans la section précédente, le choix de Billups est celui de la raison. Olshey veut que ses joueurs défendent le fer car marquer des points, c’est bien ! Mais ne pas en prendre trop, c’est encore mieux.
Les Blazers avaient la 5e moyenne de score la plus haute la saison dernière avec 116.1 points par match, mais la 23e moyenne de points encaissés avec 114.3 points pour le 29e défensive rating de 116. Et qui d’autres de mieux que l’ancien meneur des Pistons sait ce qu’il en coûte de ne pas trop encaisser de points. Billups a été le meneur de l’une des plus grandes équipes défensives de l’histoire, s’arracher sur tous les ballons, bouger ses pieds pour ne pas se faire déborder et contester tous les tirs. Alors oui, nous sommes en 2021 et il parait insensé de croire que les Blazers ne vont encaisser que 84 points par match comme les Pistons en 2004, mais le nouveau coach peut clairement apporter cet état d’esprit demandé par Olshey. L’implication des deux côtés du terrain. Car oui, sur les neuf saisons de Stotts à la tête de l’équipe, une seule d’entre elles faisait partie du top 10 des defensive ratings.
L’animation offensive repose énormément sur des individualités comme le souligne la moyenne de passes décisives par match sous l’ère Stotts. Sur les cinq dernières campagnes, les Blazers n’ont jamais dépassé les 23 passes décisives de moyenne se classant parmi les 23 et 30e de la ligue. Deux points majeurs sont donc à cibler pour Billups : le manque de rigueur défensive et le manque de variété en attaque.
La défense, quelle défense ?
Pour comprendre comment les Blazers se classent parmi les pires défenses de la ligue, nous avons décortiqué certaines statistiques parlantes du manque d’implication des joueurs à ce niveau-là et voici ce qu’elles nous disent :
Le manque d’implication et d’effort défensifs s’illustrent dans le jeu par 3 statistiques majeures, le pourcentage moyen des tirs contestés par l’équipe est à 47.7% soit le plus haut la ligue ce qui implique logiquement un pourcentage élevé au shoot pour les adversaires, avec une moyenne de 47.3%, 13.8 points par match (24e) sont encaissés en tir de deuxième intention et enfin c’est 13.7 points (24e) par match que les Blazers concèdent sur les contre-attaques adverses. Un manque de concentration dans le re(placement) et d’implication évidente de la part de toute l’équipe. Le chiffre élevé de points encaissés en 2e chance s’explique par un cercle pas vraiment protégé en défense alors que les intérieurs sont pourtant très impliqués en attaque.
Deux pourcentages significatifs illustrent ce phénomène, les Blazers font un box out défensif (protection du rebond) de 68.7% des cas, soit le pire pourcentage de la ligue alors qu’ils font un box out offensif (prendre la position pour récupérer le rebond offensif) dans 31.8% des cas, soit le meilleur pourcentage de la ligue. Des joueurs comme Enes Kanter ou Jusuf Nurkic faisaient un véritable chantier dans les raquettes adverses quand il s’agissait de gober des rebonds, mais l’histoire est bien différente lorsqu’il fallait protéger le cercle. Vient également le sujet sensible du manque d’implication et de motivation de Lillard en défense. Billups, un ancien joueur respecté, ne manquera pas de souligner ce point à son génial meneur et leader qui ne conteste par exemple que quatre tirs par match.
Peu de créativité en attaque
Comment mieux débuter cette analyse qu’en mentionnant la moyenne de passes décisives par match. 21.3 assists, soit la dernière moyenne de toutes les équipes. Ne nous y trompons pas, malgré les 7.5 passes décisives par match de Lillard, les joueurs de Portland se passent très peu la balle y compris dans le jeu avec seulement 244.6 passes par match. Ainsi, sur les 116.3 points par match seuls 55.6 sont générés après une passe décisive. Enfin, pour souligner les individualités, 17.6% des tirs sont pris après six dribbles ou plus dont une grande partie pour Lillard, bien obligé de s’employer pour ramener du scoring. Un rôle qu’il assume sans problème, mais qui l’oblige souvent à être en isolation (7e en nombre de possessions sur cette pratique). Son usage rate est de 31%, soit le 12e de la ligue. Lillard ne guide pas l’attaque des Blazers, il l’incarne.
En ce qui concerne désormais le jeu intérieur, il souffre aussi logiquement de ce manque de variété offensive. En effet, si les Blazers artillent efficacement derrière l’arc, 40.8 tentatives en moyenne pour un pourcentage de 38.5%, ils en ont totalement oublié les points dans la raquette. Seulement 39.3 points (30e de la ligue) et 30.7 drives par match (également dernier). Beaucoup de chiffres, mais ceux-ci sont utiles pour comprendre le jeu des Blazers, ses faiblesses et apporter une solution pour trouver un meilleur équilibre.
Terry Stotts avait construit une relation spéciale avec Lillard. Chauncey Billups aura sans doute à cœur d’en faire autant pour gagner la confiance de sa star et construire ensemble un projet plus ambitieux et un fond de jeu plus équilibré. Même s’il a fait ses preuves en assistant chez les Clippers, il est important de rappeler que Billups est un coach rookie. On ne sait donc pas vraiment à quoi s’attendre de sa part et c’est à la fois positif comme négatif. Il faudra du temps pour que les automatismes se mettent en place, mais ça ne peut qu’être mieux en défense pour l’équipe.
Billups n’était pas Gary Payton, mais c’était un joueur dur, col bleu, qui savait s’adapter au profil de joueur en face de lui pour le faire déjouer et faire valoir son impact offensif. Il ne va sans doute pas demander à Lilllard de défendre comme un Jrue Holiday, mais bel et bien de s’impliquer davantage, de contester plus de tirs et d’utiliser son physique en défense individuelle. Dame a bien entendu toute la confiance de l’équipe et en tant que leader il pourra insuffler cette envie de se donner des deux côtés du terrain sous l’impulsion de Billups.
Il s’agira également de donner un rôle plus défensif aux intérieurs. Larry Nance Jr. peut apporter une dimension athlétique défensive très intéressante. Jusuf Nurkic, quant à lui, devra imposer leur physique dans la raquette pour protéger le cercle et laisser moins de tirs en seconde chance pour les adversaires.
Finalement, le facteur X sera pour Billups de créer un état d’esprit plus combatif et impliquer les joueurs des deux côtés du terrain. Pour cela il aura besoin de l’appui de Damian Lillard pour gagner la confiance de ses joueurs et les pousser à faire ces efforts.
Agis McCollum !
Sauf cataclysme, les Blazers devraient figurer parmi les équipes qualifiées pour les playoffs et éviter le play-in tournament. C’est sur cette période que l’on a décidé de se concentrer en ce qui concerne la statistique majeure et plus précisément sur un joueur, CJ McCollum, le lieutenant de Lillard. Mais est-il uniquement son lieutenant en saison régulière ?
Une question qui implique une vraie réflexion tant le joueur est magnifique en saison régulière et se montre très irrégulier en playoffs – comme le souligne une statistique révélatrice de ce contraste, le +/- sur 100 possessions. En 47 matchs de saison régulière, CJ réalise un +/- (plus / minus) de +6.7, soit un impact très positif et dont +5.5 lorsqu’il est sur le parquet. D’ailleurs, sur les trois dernières saisons, McCollum amène toujours un impact positif lorsqu’il est sur le parquet. L’arrière de 29 ans se révélait très efficace en saison régulière pour une moyenne d’environ 22.5 points sur les trois dernières campagnes et un répertoire offensif ultra complet. La saison dernière, CJ tire à 45% et 40.2% derrière l’arc pour son plus haut eFG% (effective field goal percentage) avec 55.4%. Cette année, face aux Nuggets, il est passé de 40% à 3 points en régulière à 33% pour sept tentatives.
Cette shotchart de la saison 2020-2021 du joueur des Blazers illustre bien sa polyvalence et son efficacité en attaque. Un vrai atout pour suppléer et faire respirer Lillard. Et ce n’est pas pour rien que ce duo d’arrières se classe parmi les plus prolifiques depuis quelques années maintenant. Stotts a permis à CJ de se développer et de s’épanouir dans le schéma de jeu proposé par le coach. Mais, et oui parce qu’il y en a bien un, mais à tout ça, McCollum s’éteint (ou presque) dès lors que la saison régulière se termine et perd grandement en efficacité. Ainsi, le +5.5 lorsqu’il est présent sur le parquet en SR se transforme en -2 pendant les playoffs. Sur les trois dernières saisons, il cumule un +/- de -6.06 en playoffs.
Cette situation est préoccupante pour les Blazers d’autant que durant l’intersaison, l’équipe a perdu en talent offensif avec le départ de Carmelo Anthony. Il faudra donc que McCollum step-up et se montre plus efficace et prêt pour le début des playoffs. Là-dessus aussi, Billups aura un vrai rôle à jouer pour permettre à son arrière de se rendre par exemple plus utile dans d’autres compartiments du jeu, comme la création et l’implication défensive. Une chose est sûre, c’est que cette saison peut s’avérer décisive pour l’avenir de CJ avec les Blazers, qui doit assumer son rôle de numéro 2, en playoffs comme en régulière.
Le 5 de départ potentiel
- MJ : Damian Lillard
- A : CJ McCollum
- AI : Norman Powell
- AF : Robert Covington
- P : Jusuf Nurkic
Notre pronostic : 44-38 (8e)
Cette saison sera-t-elle un véritable bouleversement dans l’identité de l’équipe avec l’arrivée de Billups ou va-t-il se heurter à un mur et ne pas réussir à transmettre à Portland sa philosophie de jeu ? La saison sera en tout cas déterminante pour les Blazers, le front office, Lillard et déjà Billups qui devra imposer sa philosophie. Olshey demande de la défense et a considéré que l’équipe avait atteint son plafond avec Stotts. Quel sera alors le plafond avec Billups ? L’équipe semble avoir gagné en défense en tout cas, reste à voir comment cela va se traduire sur le parquet tout au long de la saison. Le très fidèle Lillard est un joueur magnifique doté d’une capacité de scorer de façon presque illimitée. Craint par tous les meneurs de la ligue, à lui désormais de faire évoluer son jeu au service du collectif et insuffler à ses coéquipiers cette envie de se donner des deux côtés du terrain.
Rendez-vous à l’issue des 82 matchs de saison régulière pour constater le travail qui aura été réalisé par Billups pour sa première année en tant que head coach d’une équipe NBA. Nous, en tout cas, on table sur 44 victoires pour 38 défaites et une qualification en post-season au bout du tunnel.