Le Moda Center reprend vie dès le 22 octobre prochain. Les Blazers doivent redire leur ambition du très haut niveau et ne pas relâcher leurs efforts. Que pouvons-nous attendre du groupe de Terry Stotts ? Preview.
Bilan de la saison précédente : 59 victoires – 29 défaites, 3e de la Conférence Ouest.
115-115, 12 secondes à jouer. Damian Lillard remonte la balle. Il le sait, c’est la dernière action de ce quatrième quart-temps. L’overtime ou la victoire. À 3-1 contre le Thunder au premier tour des playoffs, le meneur a entre les mains un des ballons les plus importants de toute sa carrière. Il s’avance en isolation face à Paul George, finaliste pour le trophée de meilleur défenseur de l’année. Un rapide regard au chrono qu’il laisse défiler, il prend ses appuis à 9 mètres, s’élève et shoot. L’Oregon tout entier retient son souffle. Dame Time. Ficelle. Le stade se lève. Il vient de qualifier Portland en demi-finale après un buzzer beater historique et une ligne de stats étouffante.
Qui pouvait prévoir une saison aussi qualitative de la part de Rip City ? Après la désillusion du sweep contre les Pelicans en Playoffs, le management mise sur la continuité. Seuls Nik Stauskas et Seth Curry sont recrutés pour apporter du shoot et du jeu extérieur, le bosniaque Jusuf Nurkic est, lui, prolongé après sa saison à 14 points et 9 rebonds dans la raquette. Plutôt attendus au milieu de la Conférence Ouest, les Blazers ont relevé la tête et regardé de nombreuses franchises droit dans les yeux. À l’image de sa campagne de Playoffs, le numéro 0 de la franchise signe une saison impressionnante à titre individuel. 27,7 points, 6,9 passes et 4,6 rebonds à 44,4% au tir. Il s’est illustré en véritable leader sur le parquet et dans le vestiaire. De son côté, le lieutenant, C.J McCollum, s’est parfaitement adapté à son rôle, partageant la gonfle avec son meneur, sachant step up dans les moments cruciaux, notamment quand Lillard manquait d’adresse. Nurkic, l’intérieur préféré de la franchise se blesse tragiquement en février lors d’une mauvaise réception. Sa jambe tourne et le péroné et le tibia se fracturent. Chacun pouvait penser que son absence allait considérablement affaiblir le groupe. Pourtant il n’en sera rien, Kanter saura prendre ses responsabilités en fin de la saison, assurant un apport suffisant dans la raquette. On ne devrait pas revoir le joueur bosnien sur un parquet avant février.
Le spot 3 est validé et les Playoffs seront tout aussi brillants. Après le Thunder, ils viendront chercher les Nuggets en 7 matchs très partagés et tomberont contre les Warriors, 4-0. Du beau jeu, lent, intelligemment posé et dirigé par Terry Stotts. Un régal pour les fans des Blazers.
Arrivées : Mario Hezonja, Anthony Tolliver, Pau Gasol, Kent Bazemore, Hassan Whitheside.
Prolongations : Rodney Hood, Damien Lillard, C.J. McCollum.
Départs : Enes Kanter, Al-Farouq Aminu, Jake Layman, Seth Curry, Meyers Leonard, Maurice Harkless, Evan Turner.
Si l’été dernier avait été très calme, le management a du prendre des positions sur le marché pour rester le plus compétitif possible. Tout d’abord, le backcourt, poumon de la franchise, est prolongé. CJ McCollum signe pour 3 ans et 100 millions de dollars, Damian Lillard pour 4 ans et 196 millions de dollars. Un signe très fort envoyé par le franchise player. Il aime Portland et montre qu’il croit fort en ses chances de gagner un titre dans l’Oregon pendant son prime. De nombreux role-players ont fait leurs valises comme Kanter aux Celtics, Aminu au Magic et Curry à Dallas. Le front-office a donc cherché à renouveler son effectif. La raquette est fortement renforcée avec l’arrivée d’Hassan Whitheside qui quitte enfin la Floride et de Pau Gasol comme vétéran. Kent Bazemore vient apporter de la percussion et de la défense à l’aile, comme Hezonja en spot-up shooteur qui va s’intégrer dans la rotation.
Situation des Portland Trail Blazers
La banque est pleine cette année à Portland, Jody Patton va devoir mettre la main au portefeuille et payer la luxury taxe. Un backcourt avec autant de talent et prolongé jusqu’en 2023-2024 coûte cher. Lillard-McCollum pèsent 57 millions de dollars et prendront jusqu’à 85 millions dans 4 ans. Des contrats courts d’un an comme celui de Whitheside ou de Bazmore viennent alourdir le cap space. Si leurs finances manquent clairement de flexibilité pour les prochaines années, les Blazers visent plutôt juste. Le front-office souhaite un maximum de stabilité et ne souhaite pas changer de direction. Alors pourquoi faire des économies ? L’un des meilleurs joueurs de leur histoire est dans son prime, il faut donc tout mettre en oeuvre pour profiter de son talent et aller le plus loin possible. La saison prochaine, ils retrouveront un peu d’espace et devront faire des choix cruciaux concernant Whitheside et Bazmore qui seront free agent à l’été 2020, ou encore Hood qui ne saisira probablement pas sa player option à 6 millions de dollars.
Situation à la Draft 2020 : 1er tour de Draft et un 2nd tour de Draft envoyé à Brooklyn, protégé 31-55.
Potentiel 5 majeur :
- PG : Damian Lillard
- SG : C.J. McCollum
- SF : Kent Bazemore
- PF : Zach Collins
- C : Hassan Whiteside
Pas de surprise concernant le backcourt. Dame D.O.L.L.A et son lieutenant seront verrouillés titulaires dès le 22 octobre prochain. Kent Bazemore, l’ancien ailier d’Atlanta, devrait s’imposer au poste 3. Bon défenseur, il est aussi capable de prendre des responsabilités sans ballon. Lors du Media Day, Stotts avait aussi évoqué la possibilité de commencer de temps en temps avec Hezonja. Pour sa troisième saison dans la Grande ligue, Zach Collins sera le poste 4 titulaire. Il a su convaincre son coach l’année dernière avec des playoffs sérieux et aura plus de minutes sur le parquet cette année. Whitheside va faire figure d’autorité en l’absence de Jusuf Nurkic. Mais le retour du Bosniaque devrait pousser l’ex-intérieur du Heat sur le banc. Impossible à concevoir pour la caractériel Hassan diront certains, mais il n’est pas envisageable que Nurkic, pivot de confiance, dévoué et intégré dans le projet, soit relégué comme back-up. Un cinq majeur très intéressant qui va devoir jouer de nouvelles cartes à l’aile et au pivot mais aussi et surtout sur son banc. Les rotations devraient s’organiser autour de Rodney Hood, qui dirigera la second unit depuis son poste 2 et pourrait tenir la balle avec le prometteur Anfernee Simons. Rappelez-vous, le 10 avril dernier, il scorait 37 points accompagnés de 6 rebonds et 9 passes décisives pour sa première titularisation avec Portland. Un première depuis 1985 en NBA. Tolliver devrait probablement tourner sur le poste 4 derrière Collins. Pau Gasol, en fin de carrière, va apporter son expérience et sa voix au groupe et sera modeste remplaçant au poste de pivot avec Moses Brown.
La franchise parie sur le long terme et la continuité. Mais pour aller où ? Quels objectifs ? Comment mieux faire ? De nombreuses questions qui vont animer la saison des Blazers cette année.
Le début d’une dynastie ?
Franchise player, old school. La NBA change de visage ces dernières années. Les superstars n’hésitent pas à quitter leur première franchise pour rejoindre des marchés plus compétitifs et avoir plus de chance de remporter une bague. Finis les Dirk Nowitzki, à l’image de Lebron James qui a quitté par deux fois les Cavaliers, pourtant sa franchise de cœur, pour d’autres challenges. Pourtant, quelques puristes se cachent encore, notamment un certain Damian Lillard. Drafté par Portland en 2012, il est le visage de Rip City. Ses 23,5 points de moyenne en carrière en Oregon ont grandement contribué au maintien de la franchise à haut niveau. Mais si on ne doute pas de ses qualités pour sortir une saison de calibre MVP, on peut néanmoins en attendre beaucoup de sa part au niveau du leadership. Il est la clé et va devoir élever la voix. Les nouveaux jeunes et role-players qui ont rejoint le groupe vont avoir besoin d’être accompagnés et c’est lui qui tiendra la baguette sur le parquet. Sa connexion avec Whitheside est fondamentale. Le pivot va remplacer Nurkic pendant les 2/3 de la saison et Damian va avoir pour mission de l’intégrer et le recarder dès que nécessaire. Le pick and roll peut être destructeur si les deux joueurs trouvent des liens forts. La saison sera longue et devrait se poursuivre jusqu’en mai pour les Blazers, le baromètre du groupe dépend de la forme du numéro 0. Toujours très attendu, il devra user de son talent pour sublimer le collectif qui l’entoure. Sera-t-il l’effigie d’une nouvelle dynastie dans l’Oregon ? Oui, si les résultats suivent.
Coaching : même partition. Après la débâcle contre les Pelicans pendant les playoffs 2018, Terry Stotts était tout proche de la sortie. La désillusion était grande et nombreux étaient ceux qui réclamaient son licenciement. Le management a finalement décidé d’être indulgent et de patienter encore une saison. Un pari gagnant à l’image de la magnifique saison de Portland. Le travail de fond sur cet effectif a payé et le coach a donc été logiquement reconduit à son poste puis prolongé jusqu’en 2022. En place depuis 2012, il a mené les Blazers en playoffs 6 fois sur 7. Il va avoir un rôle fondamental dans l’intégration des nouveaux éléments comme Whiteside ou Bazemore pour rester au niveau. Il semble s’intégrer lui aussi dans l’esprit du projet à long terme. À noter qu’il est à 89 victoires de devenir le coach le plus victorieux de l’histoire de la franchise, devant Jack Ramsay.
Un effectif profond. Le banc s’est renouvelé complètement cet été. Le lieutenant Al Farouq, ou encore le shooter Seth Curry sont partis relever d’autres défis et le front-office a dû retrouver des role-players pour relancer le groupe avec la même profondeur. Le 5 majeur, nous l’avons vu, est prometteur et les ajouts comme Hezonja et Tolliver vont apporter du rythme et du shoot dans la rotation, encadré par Pau Gasol qui vient déposer ses valises dans l’Oregon. À 39 ans, il pourra partager son expérience précieuse du jeu en sortie de banc. Nassir Little a aussi été récupéré à la Draft. Un bon coup, récupéré en pick 25, qui apportera de la défense et de l’adresse sur les postes 3 et 4. Le rookie n’est pas NBA ready, au niveau du handle ou de la création, mais va profiter d’un système mature pour se développer. Labissière, Trent, Caupain ou le Français de Wake Forest (two-way contract) vont venir combler les manques dans la rotations. L’effectif est complet et bien construit. Que faut-il de plus ?
Où est le plafond de verre ?
Des efforts en défense. Les Blazers encaissaient trop de points l’année dernière : près de 109 par match en moyenne. Avec les nombreux départs, ils ont du se renforcer. Les arrivées d’Hassan Whiteside et de Kent Bazemore vont faire du bien au secteur défensif, tout comme le gain de minutes de Zach Collins qui va rendre l’accès au cercle plus compliqué. Portland était très actif au rebond la saison passée et a permis de maximiser les possessions. Nurkic va beaucoup manquer jusqu’à son retour en février-mars. Vision de jeu, mobilité, shoot, défense, le pivot régalait sa franchise et sa blessure a fait l’effet d’un tremblement de terre. Beaucoup critiqué pour son comportement parfois difficile à gérer, Hassan devra absolument faire des efforts et se donner en défense pour ne pas pénaliser le secteur intérieur.
Un Conférence Ouest impitoyable. Le classement de l’année dernière était plus que resserré. Rip City prenait la 3e place avec 53 victoires, devant les Rockets (4e) qui comptent le même bilan mais se sont fait devancer au tie-breaker, le Jazz avec 50 victoires et le Thunder avec 49 victoires. La course aux Playoffs risque d’être encore plus compliquée cette année avec la compétitivité qui s’intensifie à l’ouest. Si Golden State s’est affaibli, les Rockets, le Jazz, les Clippers, les Lakers, les Pelicans, les Mavericks se sont renforcés et vont amener encore plus de pression. Vont-ils alors pouvoir faire mieux ? Avec le manque de Nuric et tous les nouveaux éléments à intégrer au roster, cela risque d’être compliqué. Si les Blazers sont talentueux et que la franchise a trouvé ses repères, comment franchir un nouveau palier et les finales de conférence ? Le talent des leaders, Lillard et McCollum ne peut pas être remis en cause, mais on peut douter de leur capacité à regarder droit dans les yeux des franchises comme les Clippers ou les Rockets sur 4 matchs de Playoffs. La saison à venir a d’ores et déjà un goût de test, où le coach va devoir pousser le plafond de ce groupe le plus haut possible. En cas de résultats satisfaisants en Playoffs, le front-office devrait continuer à travailler dans le même sens. Mais imaginez Portland sortir 4-1 contre le Jazz au premier tour, que faire ? L’impression de stagner pourrait donner envie de changer de coaching ou de méthode de recrutement.
5 matchs clés de la saison :
- 23 octobre 2019 : Portland – Denver. Un match d’ouverture qui risque d’être éclatant à domicile. Les deux équipes pratiquent des baskets très intéressants des deux côtés du terrain.
- 16 au 25 novembre 2019 : Premier road trip. San Antonio, Houston, New Orleans, Milwaukee, Cleveland, Chicago… Un must win avant l’hiver.
- 20 janvier 2020 : Blazers – Warriors. Choc contre Golden State pour le Martin Luther King Day. Curry contre Lillard, McCollum contre Russell : l’affiche est prometteuse.
- 22 mars au 30 mars 2020. Deuxième road trip. Minnesota, Charlotte, Detroit, Boston, Philadelphie, Brooklyn. Celui-ci sera compliqué pour performer en fin de saison, le groupe devra tenir le rythme.
- 29 janvier 2019 : Portland – Houston. Réception des Rockets avec le retour du duel Lillard – Westbrook qui va rappeler de mauvais souvenirs au meneur de UCLA. Comme un air de revanche.
Damian Lillard croit en sa franchise. Avec leurs ajustements, les Blazers vont devoir déjouer les pronostics une nouvelle fois. Leur sérieux et la continuité vont-ils payer ? Cette saison va être fondamentale dans l’histoire des Trail Blazers. Quoiqu’il arrive, pour voir du beau basket et des systèmes bien équilibrés, il faudra les regarder jouer. À vos League Pass !
Photo : Jonathan Ferrey/Getty Images