Les Hawks peuvent-ils imploser en plein vol ?

par Lukas Folkowski

Après avoir récupéré Dejounte Murray à l’intersaison, les Hawks affichaient de grandes ambitions pour cette saison. Sauf que l’équipe est aujourd’hui au même stade que l’année dernière et ne semble pas franchir les caps tant attendus. Pourquoi est-ce que les Hawks ne parviennent pas à s’envoler de nouveau vers les hauteurs de l’Est, et surtout faut-il s’inquiéter pour le futur de la franchise ?

Un manque de spacing évident

Quand on regarde jouer les Hawks, on ne peut qu’être déçu quant à leur spacing. Les Hawks sont en effet l’une des pires équipes de la ligue derrière la ligne à trois points, tant au niveau du volume (24e avec 31,1 tentatives par rencontre) que du pourcentage (27e avec 33,3 %). Cela contraste avec la saison dernière puisque Atlanta avait alors le 2e meilleur pourcentage de loin, et était redouté pour sa capacité à prendre feu partout sur le terrain. 

On comprend donc que les pertes n’ont pas été compensées pour conserver cette qualité extérieure. Kevin Huerter ou Danilo Gallinari représentaient la saison dernière des menaces de loin. Dejounte Murray — recrue phare de l’été et All-Star — est un joueur davantage porté sur le mid-range que sur le tir longue distance. 

Le nouveau combo-guard des Hawks n’a jamais été reconnu comme étant un joueur efficace au tir. On pointait déjà au moment de sa draft ses difficultés au niveau du shoot. Bien qu’il est progressé pour devenir bon à mi-distance, il a tout de même une efficacité inférieure à la moyenne de la ligue (-9 % à deux points et -3 % à trois points).

Il est donc à la fois à l’origine et une victime de ce manque de spacing. 

Il n’est pas le seul joueur dans ce cas puisque John Collins réalise la pire saison de sa carrière (13,2 points et 8,1 rebonds) depuis son arrivée en 2017. Il affiche ainsi un vilain 23,7 % de réussite de loin, alors qu’il en tente 3,2 par rencontre. Il est loin de l’efficacité qu’il avait pu montrer par le passé (40 % de réussite de loin entre 2019 et 2021 sur un volume similaire). Il fait d’ailleurs partie des intérieurs qui inscrivent le moins de points par shoots tentés (1,17 soit le 32 th percentile). 
Il a pourtant un rôle capital dans le spacing de sa team puisqu’il évolue — presque — constamment au poste 4 (89 % du temps). Il est par conséquent majoritairement associé à Clint Capela ou Onyeka Okongwu, deux pivots qui ne sont pas reconnus pour leur capacité à étirer les défenses. En étant moins efficace, John Collins permet donc aux adversaires de fermer davantage l’accès à la raquette sans être sanctionné à distance.

Malgré leur activité défensive (15e rating défensif), Dejounte Murray et John Collins ne sont pas assez adroit de loin (30,7% combiné) pour améliorer l’attaque d’Atlanta. – Photo : Todd Kirkland / Getty Images

Atlanta est ainsi l’équipe qui tente le plus de tirs à mi-distance (38 %) pour une efficacité qui reste bonne (44,6 %). Cela n’est pourtant pas suffisant pour permettre à cette équipe de scorer efficacement (20e rating offensif). Les équipes l’ont bien compris, car ils empêchent les Hawks d’accéder au cercle et donc d’obtenir des lancers francs, qui sont les actions rapportant le plus de points.

Un mouvement de balle au point mort

Atlanta a cette saison un jeu très stéréotypé tourné autour de ces deux stars Trae Young et Dejounte Murray. C’est à eux deux que revient la tâche de créer et d’animer toute l’attaque. Il n’est donc pas étonnant qu’ils soient impliqués dans 75,6 % des points inscrits en moyenne. Les Hawks sont aussi l’équipe qui réalise le moins de passes par rencontre, preuve que la circulation de balle n’est pas leur qualité première. Cela représente d’ailleurs une baisse par rapport à la saison dernière où ils étaient déjà 29e.

Usage PercentagePoints inscritsPoints créés par une passe décisivePoints créés par rencontre (scoring + assist)
Trae Young (meneur de jeu)33,5 %
(5e de NBA)
27,3 points24,2 points51,5 points
Dejounte Murray (combo guard)27,1 %
(26e de NBA)
20,6 points15,1 points35,7 points
TotalX47,9 points39,3 points87,2 points

Alors que l’année passée, Trae Young était le seul joueur à polariser le ballon, ils sont aujourd’hui deux à faire cela. Ce sont donc leurs coéquipiers qui en pâtissent directement puisque ces derniers contribuent trop à la création, et se retrouvent très souvent avec le ballon en fin de possession. 

Atlanta est l’une des équipes qui réalisent le plus de pick-and-roll par rencontre. Les joueurs qui ne sont pas impliqués dans l’action sont dès lors restreints à attendre de recevoir la balle en fonction des rotations adverses. Mais dans le même temps, Atlanta est la pire équipe en termes de catch-and-shoot de loin (32,8 % de réussite). 

Les autres joueurs devraient donc à priori proposer des cuts dans la raquette afin de déstabiliser les défenses et ainsi obtenir des paniers simples. Or ce n’est pas le cas puisque les Hawks ne sont que 19e en termes de fréquence de coupe. On se retrouve ainsi avec une attaque statique qui devient prévisible et par conséquent facile à freiner. 

En outre, Atlanta est la 9e équipe qui réalise le plus d’isolation par rencontre pour la 8e efficacité. On pourrait être à priori ravi de voir que les Hawks s’appuient sur leurs points forts pour scorer. Or, cette manière de jouer n’est pas viable puisqu’elle repose trop sur les miracles individuels de ses stars. 

C’est d’ailleurs ce qu’avait exploité merveilleusement bien la défense du Heat en playoffs sur Trae Young l’année dernière (15,4 points à 31,9 % dont 18,4 % de loin). Ce dernier avait complètement déjoué face aux défis physiques proposés par Gabe Vincent et le reste de ses coéquipiers (30 assists pour 31 turnovers sur la série), entraînant dans sa chute sa franchise qui n’avait pas pu résister.

Pourquoi Trae Young n’est plus aussi impactant que par le passé ?

Dès son arrivée dans la ligue en 2018, Trae Young s’est imposé comme l’un des meilleurs meneurs en NBA. Il est une arme offensive létale grâce à son habileté à la passe et à scorer d’à peu près partout sur le terrain.

Sauf que le meneur originaire du Texas ne parvient pas à trouver la mire. Il affiche cette saison ses plus mauvais pourcentages au tir, notamment de loin (31,1 %) alors que c’est l’un des aspects les plus importants de son jeu. C’est plus précisément sur les trois points en pull-up que le joueur a perdu en efficacité, passant de 37,0% (6,9 tentatives par match) à 30,1% (5,8 tentatives) en un an. Son nombre de points inscrits par tir tentés et ainsi passés de 1,21 à 1,11 sur la même période, preuve que sa maladresse lui fait grandement défaut.

Malgré des statistiques individuelles bruts toujours excellentes (27,3 points, 9,9 passes), Trae Young n’est plus aussi dominant à cause de son adresse défaillante (41,6% dont 31,1% de loin). – Photo : Adam Hunger / Getty Images

Mais le front office des Hawks avait en quelque sorte prévu cela en s’adjugeant les services de Dejounte Murray (20,6 points et 6,2 passes cette saison). On pouvait imaginer qu’en tant que second ball-handler principal de l’équipe, l’ancien meneur des Spurs pourrait soulager Trae Young en s’occupant de la création pour lui offrir des tirs plus faciles. 

Mais « Ice Trae » n’a pas réellement développé son jeu sans ballon cette saison. Si l’on s’intéresse à sa part des paniers qui ont été inscrits sur une passe de l’un de ses coéquipiers, on voit qu’il n’y a que deux meneurs qui ont un pourcentage plus faible que lui : Shai Gilgeous-Alexander et Luka Doncic. Or ce sont les deux franchises players de leurs teams où ils sont pourtant moins bien entourées que Trae Young. Son nombre de catch-and-shoot à trois points n’a pas réellement augmenté puisqu’il est passé de 1,0 par rencontre l’année dernière (à 48,1%)  à 1,3 cette saison (35,6%). 

Les défenses commencent donc à connaître sa manière de jouer, et s’ajustent en fonction de cela. Il est par exemple moins efficace sur les situations de pick and roll. Il était l’un des meilleurs joueurs sur ce type d’action en 2022 (0,97 point) alors que cette année il est juste un peu au-dessus de la moyenne de la ligue (0,90 point). Il pâtit bien évidemment du manque de spacing évoqué précédemment, mais cela reste tout de même problématique.

Cette perte d’efficacité offensive impacte Atlanta puisque Trae Young est un mauvais joueur défensif par nature. C’est pourtant en attaque qu’il arrivait à compenser ce « manque à gagner » en étant un joueur tout simplement historique, capable d’être le meilleur scoreur et passeur — en total — sur une saison.

Offensive RatingDefensive RatingNet Rating
Avec Trae Young (2022-23)115,5116,5-1,0
Sans Trae Young (2022-23)109,6109,30,3
Evolution-5,9-7,21,3
Offensive RatingDefensive RatingNet Rating
Avec Trae Young (2021-22)119,5116,62,9
Sans Trae Young (2021-22)111,2111,7-0,5
Evolution-8,3-4,9-3,4

On remarque avec ces chiffres que les Hawks s’améliorent tellement en défense lorsque Trae Young n’est pas sur le parquet qu’ils compensent sa baisse offensive. L’équipe est donc meilleure cette saison au moment où Trae Young est sur le banc. C’était pourtant l’inverse la saison dernière puisque Atlanta était moins fort quand le meneur était sur le banc.

Une franchise ouverte aux opportunités

Il y a quelques semaines, on apprenait que Travis Schlenk, président de la franchise, était remplacé par Larry Fields, le GM qu’il supervisait. Ce dernier n’est pas un inconnu puisque c’est lui qui est à l’origine de la venue de Dejounte Murray durant l’intersaison et de la draft de AJ Griffin. Il a ainsi gagné au fil des mois de plus en plus d’influence au sein de l’organigramme. On le voyait d’ailleurs de plus en plus en conférence de presse, preuve que cela était attendu et qu’il n’était qu’une question de temps avant qu’il prenne les rênes des opérations baskets.

Larry Fields, ancien joueur des Knicks, va devoir gérer efficacement de nombreux dossiers (Collins, Capela, McMillan) s’il ne veut pas perdre sa superstar. Photo : Adam Hagy/NBAE via Getty Images

Le travail qui se présente à lui n’est pas de tout repos. Alors que la franchise a hypothéqué une partie de son futur pour s’attacher les services de Murray (3 first-round pick et un swap), elle semble aujourd’hui stagner. En l’état actuel des choses, Atlanta ne paraît pas en mesure de concurrencer les grosses cylindrées de l’Est telles que Boston, Milwaukee ou Brooklyn. Larry Fields va donc devoir faire des choix dans les semaines qui arrivent, à commencer par la gestion du cas John Collins.

Comme évoqué précédemment, ce dernier est loin du niveau qu’il a pu afficher par le passé. Il n’est pas assez responsabilisé au sein de l’attaque des Hawks où il présente un usage percentage de seulement 15 % — le plus faible de sa carrière. Ces baisses au tir peuvent alors s’apparenter à une forme de perte de confiance. C’est d’autant plus dommageable qu’il était l’un des artisans majeurs des excellents playoffs 2021 où les Hawks sont allés jusqu’en finale de conférence Est. Il reste un joueur important de l’effectif de par sa défense et ses qualités athlétiques bien au-dessus de la moyenne. 

Le jeune joueur de 25 ans possède encore trois années de contrat à environ 26 millions par an après cette saison. Son nom est plus que jamais au cœur des rumeurs de transferts, car il pourrait apporter immédiatement au sein d’une équipe contender. Il pourrait également continuer à se développer au cœur d’une team en reconstruction. Il faut en effet rappeler qu’il peut progresser, lui qui a déjà réalisé une saison à 21,6 points et 10,1 rebonds de moyenne en 2020. 

Le poste du coach Nate McMillan est aussi plus que jamais en danger. Il paraît perdre de l’influence au sein de la franchise au fil des semaines, où il ne jouit plus autant du parcours des Hawks en playoffs. Avec seulement 50,4 % de victoires sur ces deux dernières saisons, il semble buter sur un plafond de verre difficile à percer. 

On apprenait récemment par l’intermédiaire de Shams Charania qu’il avait « fortement envisagé de quitter son poste ». Même si Nate McMillan a par la suite démenti ces affirmations en expliquant que « l’objectif est de faire les playoffs […] Je ferais un point avec ma famille à la fin de la saison pour voir si j’ai encore le feu intérieur », on comprend ainsi que son avenir avec Atlanta paraît de plus en plus flou.

Enfin, le nouveau GM devra surveiller de très près la situation de Trae Young. Il a en effet eu à de nombreuses reprises par le passé des déclarations douteuses de la part d’un franchise player. D’ailleurs, on apprenait il y a peu qu’il avait eu des tensions avec son coach. Ce n’est malheureusement pas la première fois que cela lui arrive puisqu’il avait également eu des différends avec son ancien coach Lloyd Pierce, qui s’étaient terminés avec le licenciement de ce dernier. 

Trae Young est encore lié avec Atlanta jusqu’en 2027. Mais le temps passe vite, et à l’heure du power empowerment, les franchises ne peuvent plus réellement voir à long terme avec leurs meilleurs joueurs. Chris Haynes expliquait d’ailleurs que selon des exécutifs provenant des autres teams, Trae Young pourrait être « le prochain joueur au contrat max à demander son transfert si son équipe ne s’améliore pas au moment des playoffs ». Atlanta doit rapidement agir afin d’éviter le pire. 

Atlanta est à une étape charnière de son existence. Alors que tout semblait idyllique il y a moins de deux ans, la franchise se retrouve aujourd’hui dans une situation délicate. Les aiglons parviendront-ils à s’envoler de plus belle vers les hauteurs de l’Est ou vont-ils se faire tirer dessus par les mauvais résultats et une gestion humaine discutable ? Réponse dans les prochaines semaines.

Une autre analyse du début de saison d’Atlanta dans notre podcast publié le 01/12/2022

Photo de couverture : © Cole Burston / Getty Images

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