Longtemps pressenti comme l’une des futures stars de la ligue, Lonzo Ball a su parfaitement s’adapter à un nouveau rôle : celui de couteau suisse. Seulement, aussi talentueux qu’il soit, le meneur n’arrive pas à enchaîner les rencontres, la faute à un physique défaillant. Il est pourtant l’un des joueurs les plus importants des Bulls, et son absence pourrait faire très mal à Chicago.
Un début de carrière contrasté
Dès son plus jeune âge, Lonzo Ball baigne dans le monde de la balle orange avec ses frères, LiAngelo et LaMelo Ball. Très rapidement, il impressionne de nombreux observateurs avec son lycée Chino Hill, qu’il mène au titre d’État. Élu M. Basketball USA, il est considéré comme une recrue 5 étoiles que toutes les universités tentent de s’arracher. Mais c’est le college californien de UCLA qui parvient à s’attacher les services du meneur.
Là-bas, il épate immédiatement par sa maturité en rendant ses coéquipiers meilleurs. Son équipe réalise une excellente saison régulière avec 31 victoires pour 5 défaites, tandis que le meneur s’épanouit au sein d’un collectif construit autour de lui (14,6 points, 6,0 rebonds, 7,6 passes). Malgré l’élimination précoce de UCLA au tournoi NCAA, Ball annonce qu’il se présente à la Draft 2017, où il est projeté très haut par tous les observateurs.
Ce sont les Los Angeles Lakers qui le sélectionnent avec le deuxième choix. Cela semble être le fit parfait puisque le meneur californien se retrouve dans une position idéale, où toute la franchise compte sur lui pour retrouver les sommets.
Sauf que la patience n’est pas tout à fait dans les habitudes de la cité des Anges. Le meneur se heurte très tôt aux remarques. Malgré une saison rookie encourageante (10,2 points, 6,9 rebonds, 7,2 passes), la plupart des observateurs se montrent critiques à son égard. Notamment sur son tir qui ne paraît pas réglé pour la NBA (36% de réussite au tir, dont 30,5% de loin et 45,1% aux lancers).
Avec l’arrivée de LeBron James, Lonzo Ball se retrouve obligé d’évoluer davantage sans ballon. « Zo » déçoit encore, malgré quelques progrès au shoot. Son avenir semble s’éloigner de sa Californie natale. Le 6 juillet 2019, il est envoyé à La Nouvelle-Orléans dans le transfert d’Anthony Davis à LA.
Encadré par Jrue Holiday, le meneur grandit sur le terrain (13,1 points, 5,5 rebonds, 6,4 passes à 37,6% de loin), mais également en dehors. Dans ce nouveau cadre, il se sépare progressivement de son père et des déboires qui lui sont liés. Associé à Brandon Ingram et Zion Williamson, Ball se retrouve alors dans un effectif jeune qui fait saliver de nombreux observateurs.
Au cours de la Free Agency 2021, il rejoint Chicago pour 84 millions de dollars sur 4 ans via sign-and-trade. Dans l’Illinois, le Californien s’épanouit pleinement et devient l’un des meilleurs 3 and D de la ligue, tout en restant capable de réaliser des passes extraordinaires. Mais alors que les Bulls montent sur le toit de l’Est, tout s’emballe.
Suite à un match contre Golden State le 14 janvier 2022, Lonzo Ball est annoncé out pour quelques semaines à cause d’une blessure au genou gauche. Seulement, le meneur ne parvient pas à s’en remettre et ne revient pas de la saison. Les Bulls s’effondrent au même moment et finissent à la sixième place de la Conférence. Chicago se fait éliminer sèchement au premier tour des Playoffs par les Bucks de Giannis Antetokounmpo (4-1) malgré un DeMar DeRozan étincelant.
Au premier abord, Ball paraissait confiant pour la reprise de la saison à venir. Finalement, le meneur a dû subir une nouvelle opération au genou gauche — la troisième depuis son arrivée en NBA — pour retrouver sa mobilité. « Je ne peux toujours pas jouer au basket. Je ne peux pas courir ou sauter », a-t-il admis devant la presse, trois semaines avant le début de la saison régulière.
Petit à petit, la peur de ne pas le voir revenir prend place dans l’esprit des fans des Bulls. On peut légitimement les comprendre, au vu de l’impact de Lonzo Ball dans cette équipe.
Pourquoi Lonzo Ball est-il valuable à Chicago ?
Du haut de ses 1,98 m et fort d’une envergure de 2,04 m, Lonzo est un excellent défenseur, capable de couvrir plusieurs positions. L’année dernière, il faisait diminuer de 4,5 % le pourcentage de réussite à trois points de ses adversaires directs. Avec 1,8 interception par match, il était par ailleurs le quatrième meilleur intercepteur de la ligue parmi les joueurs qui ont disputé au moins 35 rencontres.
Avec Ball en tant que premier rempart défensif, Chicago s’est imposé comme la 9e meilleure défense de la ligue avec 110,5 points encaissés pour 100 possessions — la même moyenne que le Jazz et les Raptors. À son départ, tout s’est effondré. Les Bulls privés de Lonzo Ball sont devenus la pire défense de toute la ligue, avec 117,4 points encaissés pour 100 possessions. Cela place le meneur parmi les 5% de joueurs les plus valuables en défense pour son équipe.
Son duo avec Alex Caruso a été une véritable révélation pour l’ensemble de la ligue. Avec les deux guards sur le terrain, les Bulls enregistraient une hausse de leur net rating de 9,5 points. Leur activité défensive, bonifiée par la présence de l’autre, leur offrait de nombreuses opportunités en contre-attaque.
Dans l’Illilois, Ball a énormément progressé sur son tir. Il est aujourd’hui l’un des meilleurs joueurs de la ligue en catch-and-shoot, alors qu’il s’agissait de l’un de ses principaux défauts en début de carrière. En 2021-22, ce type de tirs représentait 70,4% de ses paniers inscrits, avec un taux de réussite de 42,3% — soit le 5e meilleur pourcentage de la ligue, devant des snipers reconnus tels que Seth Curry ou Kyrie Irving.
Le meneur reste tout aussi efficace avec la balle, puisqu’il n’a que très peu de déchet. Avec un ratio assist-turnover de 2,17, il apporte beaucoup de sérénité au jeu des taureaux. Tout cela en jouant presque comme un deuxième arrière, souvent sans ballon, et en affichant le 5e Usage Percentage de sa team.
L’équipe des Bulls compte dans ses rangs des individualités qui ont besoin de la balle pour exister, Demar DeRozan et Zach Lavine notamment. Ball a bien compris son rôle et s’est mué en homme de l’ombre, prêt à servir ses deux stars grâce à ses passes laser.
Comment les Bulls peuvent-ils combler l’absence de Lonzo Ball ?
L’absence de Lonzo Ball va bien évidemment porter préjudice à Chicago. Par sa simple présence, il structurait le jeu de l’équipe et jouait un rôle qu’aucun joueur ne paraît en mesure d’assurer actuellement.
Pour autant, certains joueurs ont su saisir les opportunités qui se sont présentées à eux, particulièrement Ayo Dosunmu. Le natif de Chicago a profité des nombreuses minutes qu’il a eues pour montrer tout son potentiel (8,8 points, 2,8 rebonds, 3,3 passes à 52% au tir, dont 37,6% de loin). Son impact va bien au-delà des statistiques, puisqu’il insufflait un second souffle à son équipe, notamment défensivement.
Âgé de seulement 22 ans, il possède une marge de progression encore intrigante. Sa mentalité laisse croire qu’il pourrait atteindre, à terme, un très bon niveau.
De plus, Zach Lavine semble enfin remis de ses problèmes genou. Très gêné par une blessure après le All-Star Game, il n’était plus aussi explosif qu’à l’accoutumée, ce qui le forçait à prendre des tirs plus compliqués.
Prolongé au maximum cet été (215 millions sur 5 ans), l’arrière devra ainsi composer pendant une grande partie de la saison en l’absence de son meneur titulaire. Mais comme il a pu le montrer depuis son arrivée dans l’Illinois (24,4 points et 4,4 passes accompagnés de deux sélections All-Star), il semble en mesure d’assumer les responsabilités à la création et au scoring.
DeRozan sera logiquement l’autre élément majeur du collectif, mais tout ne peut pas passer uniquement par lui pour autant. En effet, malgré son excellente saison (27,9 points, 5,2 rebonds, 4,9 passes à 50,4 % au tir), il a essayé de combler à lui tout seul tous les manques de son équipe. Mais comme on a pu le voir en playoffs contre les Bucks, ce type de jeu à ses limites. L’attaque des Bulls devenait trop prévisible lorsqu’elle se reposait sur les exploits individuels de DeRozan.
Voilà pourquoi Patrick Williams devra élever son niveau cette saison. Après une année rookie encourageante, l’ailier sélectionné avec le 4e choix de la Draft 2020 a connu une saison sophomore compliquée à cause des blessures.
« P-Will » a été mis sur la touche après seulement 5 matchs, à cause d’une déchirure des ligaments du poignet gauche. Revenu à temps pour la fin de la saison, il n’a ainsi que très peu joué avec Lonzo Ball. Pourtant il a été, pendant les Playoffs, l’un des rares joueurs à se mettre en avant hormis Derozan (20 points et 10 rebonds dans le Game 3).
Alors qu’il est toujours aussi timide dans le jeu, il faudra espérer le voir évoluer davantage avec le ballon et qu’il saisisse les opportunités qui se présenteront à lui. Surtout, on attend de lui qu’il redynamise la défense des Bulls afin de retrouver le niveau qui faisait leur succès en début de saison dernière. Patrick Williams possède toutes les qualités physiques et techniques pour cela. C’est ce que mettait notamment en avant LeBron James lorsqu’il déclarait qu’il allait devenir un « talent exceptionnel » avec de « longs bras et des mains comme celles de Kawhi (Leonard) ».
Enfin, sur le même poste que Lonzo Ball, Chicago s’est renforcé en s’adjugeant les services de Goran Dragic. Le meneur slovène, sortant d’un EuroBasket réussi individuellement (14,9 points et 3,7 passes à 49,4 %) aura à cœur d’apporter toute son expérience à un groupe qui en aura cruellement besoin.
De plus, Coby White pourra également dépanner sur certaines séquences au poste de meneur. Le combo-guard, emprunt aux doutes, pourrait enflammer le United Center grâce à son adresse longue distance (38,5% l’année dernière).
Si Chicago a essayé de se renforcer à la mène, les remplaçants semblent aujourd’hui trop légers pour assumer les responsabilités de Lonzo Ball. Quand bien même ce dernier pourrait être de retour en cours de saison, des doutes subsistent quant à son état physique. Pourra-t-il revenir au niveau qui était le sien il y a neuf mois ? L’avenir nous le dira. Pour l’instant, les Bulls devront avancer sans leur torero.
Photo : Stacy Revere/Getty Images