« Paris pour Paris ». Depuis sa création, le Paris Basketball revendique une entité de précurseur pour le basket français. Alors que Paris n’est pas passé loin de la relégation la saison dernière, le défi qui se présente face à lui cette année s’annonce d’un tout autre niveau.
Une première saison dans l’élite décevante
La saison de Paris n’a pas été de tout repos. L’équipe s’est montrée régulière dans l’irrégularité, enchaînant les séries de victoires et les séries de défaites. Au moment où le maintien semblait acquis depuis un certain moment, le club de la Capitale a d’ailleurs joué avec le feu. Avec six défaites sur les huit derniers matchs, les Parisiens n’ont assuré leur survie dans l’Élite qu’à la dernière journée, en l’emportant sur le parquet de Boulogne-Levallois.
Ces déboires peuvent notamment s’expliquer par une défense douteuse. En effet, Paris était la 3e pire défense de Betclic Élite en termes de points encaissés par rencontre, tandis qu’elle n’était que la 12e meilleure attaque.
Bien évidemment, on peut justifier ces chiffres par le rythme de jeu rapide qui offrait ainsi un nombre de possessions plus important. Cette stratégie portée sur le secteur offensif a ainsi permis aux individualités de briller, que ce soit Kyle Allman Jr (15,0 points, 4,6 passes de moyenne) ou Ryan Boatright (12,1 points, 4,8 passes).
Sauf que l’ADN du Paris Basket réside avant tout dans le développement de ses jeunes joueurs. Les deux All-Stars que sont Juhann Begarin (11,1 points, 4,2 rebonds) et Ismaël Kamagate (11,3 points, 6,3 rebonds, 1,6 contre) ont réalisé une saison très encourageante pour le futur. Le pivot a d’ailleurs été récompensé par le titre de meilleur défenseur de l’année, ainsi qu’une sélection en 43e position par les Nuggets à la Draft NBA.
L’arrivée d’Axel Toupane en janvier a fait un bien fou à l’équipe. Bien que quelques soucis physiques qui l’aient gêné sur la fin de l’exercice, il a tout de même été exemplaire sur le plan statistique (13,2 points, 4,2 rebonds à 53 %). Contrairement à Kyle O’Quinn, dont l’expérience n’a pas été des plus fructueuses, Toupane s’est pleinement investi dans le projet, en s’engageant à long terme avec le club — jusqu’en 2024.
Alors que l’équipe était attendue comme un prétendant sérieux pour les playoffs, Paris a finalement terminé à une décevante 15e place. Le Front Office n’est donc pas resté inactif et a opéré des mouvements importants au cours de l’été.
« On a sous-performé (la saison dernière) », regrettait David Kahn, le président du Paris Basketball, lors d’une conférence de presse au mois de juillet. « Les entraîneurs et les joueurs ont sous-performés, donc nous tous. Je ne veux isoler personne. Nous devons tous être meilleurs la saison prochaine. »
Un changement d’entraîneur attendu
La première opération majeure de Paris a été de changer de coach. Alors qu’il était présent depuis la création du club, en 2018, Jean-Christophe Prat est arrivé à la fin de son aventure parisienne. Cette ultime saison a été éprouvante pour lui. « J’ai besoin de me poser », a-t-il admis au micro du Paris Basketball On Air, après le dernier match de la saison. « Je dois décompresser totalement. Je n’ai pas vu mes gosses depuis un mois, j’ai mis la priorité sur le basket. On fait un métier où on peut négliger notre entourage, mais j’ai besoin de me ressourcer auprès de mes proches. »
Pour le remplacer, David Kahn, président du club, a décidé de s’attacher les services de Will Weaver. Âgé de seulement 37 ans, le coach américain a déjà un CV bien rempli. Il possède un solide background en tant qu’assistant NBA, à Philadelphie, Brooklyn et Houston. Weaver a également passé du temps sur le banc de l’équipe nationale d’Australie, toujours en tant qu’assistant.
L’Américain déjà quelques expériences en tant qu’entraîneur principal. En G-League, avec l’équipe de Brooklyn — les Long Island Nets —, qu’il a mené jusqu’en finale après avoir remporté le titre de coach de l’année. Aux Sydney Kings par la suite, dans le championnat australien, avec lesquels il a réalisé une saison intéressante, mais qui n’a pas pu se conclure avec la pandémie de Covid-19. Un parcours aussi impressionnant que varié.
Will Weaver est avant tout connu comme un coach doué pour le développement des jeunes joueurs. Toutes les équipes NBA dans lesquelles il est passé étaient en reconstruction. À Philadelphie, il a connu le « Process ». À Brooklyn, il a travaillé D’Angelo Russell et les jeunes Nets. À Houston, il a participé à la transition de la franchise après le départ de James Harden, centrée sur Jalen Green. Il a donc, sur le papier, le profil parfait pour le projet parisien.
Il devra poursuivre le travail entrepris par son prédécesseur, avec un effectif composé de joueurs avec une marge de progression importante. Il aurait clairement annoncé à ses joueurs son intention de faire jouer les jeunes, comme Killian Malwaya et Mohamed Diawara, tous les deux âgés de 17 ans.
Le mercato du Paris Basketball
Sur le fond, ce changement d’entraîneur était attendu et paraît idéal. Sur la forme, cela a tout de même de quoi étonner. L’annonce a en effet été rendue publique le 22 juillet 2022, soit plus de deux mois après la fin de la saison. Cela a été préjudiciable au Paris Basketball, puisque de nombreuses autres formations avaient déjà bouclé leur recrutement alors même que le club ne faisait que commencer le sien.
Départs | Arrivées |
---|---|
Kyle O’Quinn | Tyrone Wallace |
Ryan Boatright | Aamir Simms |
Milan Barbitch | Killian Malwaya |
D.J. Funderburk | Amar Gegic |
Amara Sy | |
Lois Gendrey | |
Pacôme Dadiet |
À la vue de ce tableau, on peut aisément imaginer que le mercato parisien est loin d’être fini. L’équipe doit encore se renforcer sur des postes clefs. Paris ne pourra pas recruter d’autres joueurs de nationalité étrangers, car le quota est déjà atteint avec l’arrivée des Américains Tyrone Wallace et Aamir Simms.
Wallace est un arrière de 28 ans, avec une petite expérience en NBA — 112 matchs joués — où il n’est jamais réellement parvenu à s’imposer malgré une saison rookie intéressante aux Clippers. Capable d’évoluer avec ou sans ballon, il est surtout doté d’une jolie finition proche du cercle où il inscrit la majorité de ses points. Il peut également envoyer quelques gros shots de loin et est capable de défendre sur de nombreux postes. Sortant d’une saison intéressante en G-League (20,3 points, 5,9 rebonds, 4,7 passes, 43,1 % à trois points), il est attendu comme parmi les joueurs majeurs de la saison.
Paris a enregistré dans le même temps l’arrivée du jeune intérieur Aamir Simms. Âgé de 23 ans, l’Américain peut évoluer à la fois aux postes 4 et 5 malgré sa taille (2,03m) grâce à sa très bonne mobilité. Son QI basket lui permet de faire la bonne passe pour trouver un coéquipier démarqué ou d’artiller à longue distance. Il est également un solide rebondeur offensif, avec un toucher correct proche du cercle. Défenseur intelligent, Simms ne cherche pas l’action spectaculaire, mais préfère rester en face de son vis-à-vis pour le gêner.
Le recrutement du jeune espoir Killian Malwaya compense le départ de Pacôme Dadiet, qui était vu comme l’une des futures pépites du club. Tout au long de la seconde partie de la saison, il a eu des envies d’ailleurs, qui l’ont finalement mené à Ulm, club allemand où a précédemment évolué Killian Hayes.
Le cas Victor Wembanyama a toutefois porté préjudice à l’équipe. Alors que les deux camps étaient en contact depuis déjà deux ans, tous les signaux indiquaient une signature à venir du joyau français au Paris Basketball. Seulement, au moment de conclure, les négociations n’ont pu aboutir. Le pivot français s’est engagé non loin de là, chez les Metropolitans 92 de Vincent Collet.
Enfin, l’arrière bosnien Amar Gegic vient renforcer le backcourt de l’équipe avec son profil de créateur, pour lui-même comme pour ses coéquipiers. Sortant d’une saison encourageante en Croatie (14,4 points, 4,4 rebonds, 3,6 passes à 46,4 % au tir), il utilise à merveille son avantage de taille (2,00m) pour poster ses adversaires ou défendre plusieurs postes.
Les Playoffs, un objectif réaliste pour le Paris Basketball ?
L’effectif du Paris Basket au 24 septembre 2022 :
Arrières | Ailiers | Intérieurs |
---|---|---|
Kyle Allman Jr | Gauthier Denis | Ismaël Kamagate |
Tyrone Wallace | Axel Toupane | Dustin Sleva |
Juhann Begarin | Aamir Simms | Mohamed Diawara |
Amar Gegic | ||
Killian Malwaya |
Dans la course aux playoffs, le premier problème du Paris Basketball est le poste 1. Le club ne dispose pas d’un meneur de formation, capable de diriger l’équipe, ainsi que d’analyser les temps forts et les temps faibles. Ce rôle revient naturellement à Kyle Allman Jr, qui est avant tout un arrière scoreur. Certes capable de créer pour les autres, on remarque tout de même beaucoup de déchets dans son jeu.
Sur certaines séquences, Tyrone Wallace — qui s’est montré à son avantage sur la présaison — pourra le remplacer. Mais là encore, Paris se retrouve avec un joueur davantage axé sur la création pour lui que pour ses coéquipiers. Amar Gegic pourra également évoluer de temps à autre à ce poste, mais il ne s’agit toujours pas d’un pur meneur. Sa grande taille pourrait poser problème contre des postes 1 plus vifs.
À l’autre extrémité de l’effectif, il manque un pivot remplaçant. Un véritable poste 5 capable de suppléer Ismaël Kamagate lorsque ce dernier est sur le banc, ce qui faisait déjà défaut à Paris l’année dernière. Dustin Sleva est avant tout un poste 4 pouvant écarter la défense grâce à sa panoplie offensive. Avec ses limites physiques et son envergure, il a eu beaucoup mal à assumer des responsabilités au poste 5 l’année dernière.
Mohamed Diawara aura sûrement une carte à jouer cette saison en tant que pivot, mais il s’agit encore d’un diamant brut (17 ans). En Betclic Élite, le secteur intérieur est d’une importance capitale. Il est certain que les minutes sans Kamagate pourront être très problématiques pour Paris.
Néanmoins, on peut relever quelques motifs d’espoirs, à commencer par la qualité offensive des joueurs présents. En effet, l’équipe possède dans ses rangs de nombreux joueurs capables de créer pour eux. Les recrues Tyrone Wallace et Aamir Simms apporteront beaucoup de mouvement sans ballon, ce qui a pu manquer à Paris la saison dernière.
De plus, Paris compte divers joueurs susceptibles de prendre feu au shoot que ce soit Kyle Allman Jr, Dustin Sleva, mais surtout Gauthier Denis (41,2 % de réussite de loin depuis son arrivée à Paris en 2018).
Enfin, l’effectif compte de nombreux joueurs pouvant défendre sur plusieurs positions que ce soit avec Juhann Begarin ou Axel Toupane. Paris pourra aisément switcher en défense sans se retrouver avec des mismatchs problématiques comme cela a pu être le cas avec Ryan Boatright en 2021-22. Le club compte dans ses rangs le défenseur de l’année, Ismaël Kamagate, qui devrait continuer à progresser après avoir réalisé une Summer League intéressante qui l’a aguerri physiquement et mentalement, tout comme Begarin.
« Ma deuxième Summer League m’a permis de voir ma progression par rapport à l’année dernière, et donc de prendre plus d’expérience pour les années à venir », explique notamment Begarin. L’évolution des pépites ambitieuses du Paris Basketball, notamment celles qui cherchent à faire carrière en NBA, pourrait être la clé de la réussite du club.
En parallèle du championnat, l’équipe participera également à l’Eurocoupe. Malgré une saison décevante, le club a reçu une invitation — suscitant la polémique — pour participer à la compétition européenne. Cela signifie donc que Paris jouera au minimum 18 matchs européens.
« Je vais donner le maximum pour être le meilleur possible et aider l’équipe à gagner un titre », assure Aamir Simms. Cependant, en l’état actuel des choses, il paraît clair qu’il sera très compliqué pour le club de réussir à la fois en France et en Europe.
Avec un effectif de seulement 10 joueurs professionnels pour le moment et un calendrier plus dense, l’équipe s’expose à un risque de blessures accru. Le mercato parisien n’est probablement pas terminé et revêtira une importance capitale pour la saison. Nul doute que cette participation à une coupe d’Europe attirera des joueurs en recherche de challenge.
Les échéances extrasportives
Le Paris Basketball est plus qu’un club de basket. C’est une marque qui ne fait que grandir. Créé il y a seulement 4 ans, le club intrigue et rayonne sur la scène internationale. En témoigne sa collaboration avec SLAM, l’un des plus grands magazines de basketball dans le monde.
Par ailleurs, cette équipe appuie beaucoup sa communication sur la jeunesse et sa fierté de représenter le basket parisien. Devenu l’un des clubs français les plus dynamiques sur les réseaux sociaux, Paris séduit aujourd’hui de grands acteurs sportifs. La délocalisation d’un match à Roland-Garros est une preuve supplémentaire de son ampleur grandissante.
Le club se prépare à déménager dans une nouvelle salle. En marge des JO 2024 dans la capitale française, le club quittera son antre historique — la Halle Georges-Carpentier — pour poser ses bagages à l’Arena Porte de la Chapelle. En passant d’une capacité maximale de 5000 à 8000 personnes, Paris se dotera de la plus grande salle parmi les clubs de l’Élite. De quoi affirmer un peu plus son ambition nationale et internationale.
Depuis sa création, l’objectif de Paris est clair : jouer en première division pour l’ouverture de la nouvelle salle. Alors que le club est en avance sur son plan initial, il sera primordial d’éviter une seconde désillusion. La priorité, dans cette optique, sera d’assurer tôt le maintien, au risque de se retrouver dans une position très inconfortable. Premier test ce samedi 24 septembre, à 20h, face à Bourg-en-Bresse.
Photo mise en avant : Yoann Guerini / Paris Basketball