Une nouvelle saison de Dallas bientôt sur nos écrans. Les aventures des têtes d’affiche Luka Doncic, Kristaps Porzingis et Jason Kidd — désolé Sue Ellen et J.R — seront certainement palpitantes cette année encore. Cet été, la franchise a pris un virage dans son projet. Ces changements satisferont-ils le prodige slovène ? Se sentira-t-il assez entouré ? Cet environnement lui permettra-t-il d’atteindre le Graal suprême ? Avec ou sans Porzingis ? Pléthore de questions qui agitent actuellement les Mavericks et leurs fans.
Dallas, un univers impitoyable
Avec un bilan de 40 victoires et 32 défaites, à égalité avec les Blazers et les Lakers, les Mavs terminent la régulière à la cinquième place de la conférence Ouest. Une progression notable par rapport à la saison 2019-20, lors de laquelle les Mavericks ont fini en septième position. Un fait cependant surprenant, puisque que les chiffres de l’équipe régressent au global.
Tout d’abord, les coéquipiers de Doncic finissent avec le 9e offensive rating de la ligue alors qu’ils se tenaient à la première place de ce classement la saison précédente.. Concernant la défense, on constate la même baisse dans les chiffres, passant de 18e defensive rating au 20e. Alors comment expliquer cette progression ? Un groupe quasiment inchangé, avec pour objectif de progresser après une saison prometteuse. Des progressions individuelles, comme celles de Jalen Brunson ou Dorian Finney Smith. Une profondeur d’effectif étoffée avec une rotation à 14 joueurs pouvant contribuer… Mais ce genre de phénomène apparait comme paranormal à l’échelle NBA. Les Mavericks sont l’exception qui déforment la règle.
Malgré cette progression en saison régulière, c’est en Playoffs que Dallas est réellement attendu. Malheureusement le destin met à nouveau un terme à l’ascension des Mavs au premier tour, face aux Clippers de Los Angeles. Pourtant, le début de série est à l’avantage de Dallas, qui quitte LA avec une avance de 2-0 avant de récupérer l’avantage du terrain. Mais cette série se transforme en une partie de ping-pong rythmée jusqu’au match 6. L’expérience, plus importante côté Clippers, joue un rôle déterminant dans le Game 7 malgré l’héroïsme de Luka Doncic, avec 46 points 14 passes et 7 rebonds, à 56 % au tir. Mais le prodige slovène est trop jeune pour prendre cette victoire.

La performance de Kristaps Porzingis, supposé lieutenant de Doncic, inquiète les observateurs. Avec seulement 13 points et 5 rebonds de moyenne au cours des sept matchs, la prestation du Letton déçoit. Une combativité douteuse, un cruel manque d’adresse (42 % au tir, dont 29 % à 3 points) et une entente qui s’effrite avec le leader de l’équipe. Une connexion rompue, qui le fait notamment passer derrière Tim Hardaway Jr et Dorian Finney Smith.
La franchise est à la croisée des chemins, sans pour autant que l’on prenne la mesure des chambardements qui les attendent durant l’intersaison.
Le 16 juin 2021, d’un commun accord selon le communiqué de Marc Cuban, les Mavericks et leur Général Manager Donnie Nelson se séparent après 16 ans de vie commune. Le fils du légendaire Don Nelson était en poste depuis 2005. Il est le bâtisseur de l’équipe championne en 2011, l’homme derrière le trade pour Doncic. C’est celui qui a sans doute façonné les plus belles heures des Mavs dans l’ombre de Cuban, Carlisle et de Nowitzki. Malheureusement pour les fans de Dallas, ce n’était que la première vague du tsunami que la franchise allait subir cet été.
Le lendemain c’est Rick Carlisle qui décide à son tour de quitter son poste de Head coach. Tremblement de terre à l’American Airlines Center. L’entraîneur champion en 2011, celui qui a écrit la plus belle page de l’histoire de sa franchise, s’en va. Une décision difficile à anticiper, et qui interroge sur la structure interne de la franchise, déjà tant décriée ces dernières années. Quoiqu’il en soit, les Mavericks entament un nouveau chapitre avec Nico Harrison en tant que principal dirigeant et Jason Kidd au coachig.
Intersaison : Un été calme, trop calme
Arrivées | Départs |
---|---|
Reggie Bullock | Josh Richardson |
Frank Ntilikina | |
Moses Brown | |
Sterling Brown |
Malgré leur échec en Playoffs, l’intersaison de Nico Harrison et de ses Mavs est assez peu agitée. Seul Josh Richardson est transféré, à Boston, après un essai d’un an. Malgré un apport défensif intéressant, les problèmes offensifs et le manque d’alchimie avec Doncic ont raison de son séjour dans le Texas. L’arrière est échangé contre Moses Brown, un pivot de 2,18 m, qui sort d’une saison à 8,6 points et 8,9 rebonds de moyenne, en à peine 22 minutes par match. Son profil d’intérieur rim runner devrait apporter un peu de diversité dans la rotation de Jason Kidd.
Luka Doncic est celui qui apporte la meilleure nouvelle de l’été, bien qu’elle soit très attendue En droit d’obtenir une prolongation de contrat, le slovène signe un une extension de contrat de cinq ans pour 207 millions de dollars — le maximum. Bien sûr, sa franchise n’allait pas faire la difficile avec le cœur du projet, qui plus est pour un joueur qui vaut chaque centime de ce salaire. Cela permet à Dallas et à ses dirigeants d’envisager l’avenir sereinement, mais surtout pouvoir construire autour de sa star pour les cinq prochaines années.
À la free agency, seules trois recrues posent leurs valises dans le Texas. Tout d’abord, l’ailier Reggie Bullock pour 30 millions de dollars sur 3 ans — la dernière n’étant que partiellement garantie. Il sort d’une saison pleine et réussie, avec plus de 10 points inscrits en moyenne, presque 45 % aux tirs et près de 43 % de loin sur plus de 6 tentatives. L’ex-New-Yorkais et son profil de 3-and-D sera un renfort de choix dans la rotation des Mavs. Ses qualités au shoot et en défense devraient permettre à la formation texane de combler certaines lacunes.
Dans un profil similaire, Dallas a recruté Sterling Brown, en provenance de Houston, pour 6 millions de dollars sur 2 ans. L’ancien Bucks sort d’une saison prometteuse avec les Rockets, avec plus de 8 points de moyenne, 4 rebonds et presque 43 % de réussite derrière l’arc.
Bonne nouvelle pour les fans de basket dans l’Hexagone, le Français Frank Ntilikina complète cette intersaison. Le French Prince doit saisir cette opportunité, car en cas d’échec, son avenir en NBA pourrait être fortement compromis. Dans un collectif qui a un besoin urgent de défense et de création, Ntilikina a une carte à jouer. Il retrouve son ancien coéquipier en la personne de Kristaps Porzingis, avec qui l’entente entraperçue aux Knicks était prometteuse. Tim Hardaway Jr et Trey Burke ont déjà évolué avec lui, eux aussi, de quoi faciliter son intégration.

Pour conclure ce mercato, notons la prolongation de Tim Hardaway Jr pour 4 ans supplémentaires avec un contrat de 75 millions de dollars. En Playoffs, Hardaway Jr s’est révélé vital dans le système Maverick. Le swingman écarte les défenses grâce à sa qualité au shoot et au scoring, permettant à Doncic de maximiser son efficacité en 1 contre 1. Avec cette prolongation et cet été peu mouvementé, Dallas mise sur la continuité en ce qui concerne son effectif, ce qui permettra de jauger aisément le nouveau coach en chef.
Jason Kidd peut-il vraiment faire mieux que Rick Carlisle ?
Je conçois le caractère provocateur de la question, mais elle doit être posée. La tâche s’annonce difficile pour l’ancien meneur des Mavericks, faire aussi bien que son prédécesseur ne sera pas chose facile. La franchise semble compter sur Kidd pour relancer son effectif, et il y a bien des raisons de croire en la viabilité de ce plan.
Tout d’abord, ses anciennes expériences en tant que Head coach n’ont pas abouti aux résultats escomptés. Aux Nets, avec un effectif de superstars, l’objectif annoncé était le titre. Kidd et son groupe n’ont pas fait mieux que les demi-finales de Conférence au terme d’une saison en demi-teinte dans laquelle l’ancien meneur n’a jamais vraiment pu poser son empreinte tactique sur son groupe.
Cela l’a d’ailleurs amené à quitter la franchise à la première occasion pou prendre la direction des Milwaukee Bucks, rejoignant ainsi un certain Giannis Antetokounmpo. L’ancien meneur a immédiatement détecté le potentiel du jeune Grec et en a fait la pièce centrale de son système pendant les trois saisons et demie de son mandat. Malheureusement, le bilan n’y était pas vraiment. Avec un pourcentage de 47 % victoires pendant son passage, les résultats collectifs n’ont pas réellement évolué. Une sixième place et une huitième place plus tard, avec deux éliminations au premiers tour, le projet semblait tourner au ralenti.

Pendant son passage chez les Bucks, Kidd a été extrêmement important dans le développement de Giannis Antetokounmpo, le façonnant comme un véritable Franchise Player. D’un point de vue collectif, il a su proposer une défense plutôt hermétique par moment, notamment lors de la saison 2014-15, lors de laquelle Milwaukee a terminé avec le 4e defensive rating de la ligue. Sans toutefois trouver la recette pour faire fonctionner son attaque, le jeu prôné par Kidd est avant tout basé sur le collectif. En effet durant son passage dans le Wisconsin, les Bucks ont toujours terminé dans le top 10 des équipes réalisant le plus de passes décisives. Tout le contraire des Mavericks qui, l’an passé, s’inscrivaient parmi les équipes les moins productives en termes de passes décisives par rencontre.
Kidd pourra-t-il développer un mouvement de balle avec le roster actuel ? Avec Luka Doncic comme principal porteur de balle, cela ne fait pas de doute. Mais tout ne peut pas toujours dépendre du jeune prodige. Il est même impératif que le rôle de chaque joueur soit clair et défini pour que chacun puisse répondre aux attentes de Jason Kidd.
Les principaux axes d’amélioration de l’équipe sont la défense et la circulation du ballon, et il semble que Kidd soit l’homme de la situation. C’est exactement de ce qu’il apportait en tant que joueur. Il n’est certainement pas le coach le plus qualifié de la ligue, mais c’est comme si la casquette d’entraîneur des Mavericks lui était destinée.
Parmi les meilleurs joueurs de son temps, il pourrait d’ailleurs tirer Luka Doncic vers le haut. Depuis l’arrivée de Kidd à Dallas, les comparaisons entre le jeu des deux athlètes fleurissent. Machines à triple-doubles, porteurs de balle polyvalents, passeurs surdoués… force est d’admettre que les points communs sont nombreux. Mieux que personne, il est capable de comprendre le joueur qu’est Doncic et de l’aider à progresser. Construire une identité de jeu autour des qualités du Slovène ne devrait pas non plus poser problème.

Au-delà de sa ressemblance avec Doncic, l’arrivée de Kidd devrait permettre de faire passer un cap mental à certains joueurs de son effectif. En tant que joueur, le meneur a remporté le titre avec les Mavericks. En tant qu’assistant coach, il a accompli le même exploit avec les Lakers. Dallas vise le titre, et l’équipe a trouvé un guide qui connaît le chemin vers le sommet.
Son statut de Hall of Famer devrait également lui permettre de transmettre son message auprès des joueurs-cadres du vestiaire, comme Luka Doncic et Kristaps Porzingis. Il pourra ainsi tirer le maximum de ses deux All-Stars. Peut-être sera-t-il plus simple pour Doncic ou Porzingis de recevoir les critiques de Kidd, une légende du jeu, plutôt que de Rick Carlisle, formidable entraîneur, mais basketteur moins reconnu. C’est peut-être peu compréhensible de notre œil extérieur, mais il faut bien prendre la mesure de ce que Kidd dégage pour ces jeunes joueurs.
Égaler Rick Carlisle ne sera ne sera pas une mince affaire. Mais quand on connaît la volonté de réussir de Jason Kidd, plus rien ne peut nous surprendre. Les Mavericks ont des besoins, il devra leur apporter, et il semble qualifié pour la mission. Peut-être ce changement de coach sera-t-il la clé du succès de Dallas, où un changement s’imposait vraisemblablement. Toutefois, ce bouleversement ne signifie pas que les Mavs tirent un trait sur leur identité profonde. En recrutant un ancien de la maison pour remplacer Carlisle et en impliquant Dirk Nowitzki dans la gestion de la franchise, Dallas s’assure de rester Dallas. Voyons plutôt cela comme une mise à jour.
Décollage imminent, avec ou sans Porzingis
Kristaps Porzingis débutera bientôt sa troisième saison avec les Mavericks aux côtés de Luka Doncic. Pour l’instant, d’un point de vue personnel et statistique, ce que propose l’ex-New-Yorkais est de bonne facture. Avec 20 points et 9 rebonds de moyenne, la feuille de stats est noircie chaque soir.
En revanche dans l’impact et l’efficacité, ces chiffres sont à relativiser. 44 % au tir au global, c’est une marque relativement faible pour un intérieur. Cela peut logiquement s’expliquer par son fort volume à distance, notamment à trois point. Avec plus de 6 tentatives par rencontre sur 16 tirs tentés par soir, les shoots derrière l’arc représentent 37,5 % de son volume total, ce qui peut paraître frustrant compte tenu de son efficacité près du panier.
En effet avec un solide 72 % de réussite dans la restricted area, il est aberrant de ne l’avoir vu tenter que 168 tirs au niveau cercle durant toute la saison passée — dont une partie en transition. Il s’agit sans doute d’un point que devrait étudier Jason Kidd afin d’améliorer l’efficacité de son grand intérieur. Amener de la diversité dans le jeu du Letton pourrait vite devenir une priorité dans son évolution.
Toutefois, diversifier son jeu d’attaque ne sera pas le seul objectif cette année. L’aspect mental est souvent décrié chez Porzingis. Considéré comme un « soft guy » sous le cercle, il s’agit d’un joueur de 2,22 m qui n’a jamais pris plus de 10 rebonds de moyenne sur une saison depuis son arrivée en NBA. Sa disparition dans les moments importants, notamment lors des joutes printanières, est sans doute le meilleur exemple de ce fléchissement psychologique.

Prenons sa série de playoffs contre les Clippers comme exemple : 13 points et 4 rebonds de moyenne, des pourcentages en deçà de ses capacités. Porzingis semblait perdu et son body-language traduisait la crispation, le doute et la frustration. Avec un coach comme Kidd, le Letton pourrait progresser sur cet aspect psychologique et enfin trouver le déclic tant attendu.
Au-delà de tous ces problèmes, il faut naturellement évoquer le rôle défensif de Porzingis. À l’heure actuelle c’est un aspect négatif de son jeu. Pourtant l’ex-Knick dispose des qualités physiques et du QI basket nécessaires pour devenir un excellent défenseur. Avec l’une des plus grandes envergures de la ligue et une mobilité tout à fait convenable pour un joueur de sa taille, il pourrait devenir l’un des intérieurs les plus dissuasifs de la NBA. Il a déjà démontré par le passé sa capacité à contrer ses adversaires plus de 2 fois à chaque rencontre. Ce qui lui manque sans doute, comme évoqué plus haut, à lui d’y mettre l’énergie et la motivation pour y parvenir.
Le plus gros point noir de la carrière de Porzingis reste cependant son physique et sa tendance à se blesser. Depuis sa rupture des ligaments croisés avec New York en début d’année en 2018, l’intérieur peine à revenir en pleine forme. Pour preuve depuis qu’il a été transféré à Dallas, l’intérieur n’a débuté que 100 matchs sur les 167 disputés par la franchise, soit moins de 60 % d’entre eux. Pour que Porzingis puisse passer un cap individuel, il est impératif que son corps suive le rythme. Si tel est le cas, l’avenir de la relation entre Porzingis et Dallas pourrait enfin s’éclaircir. Au contraire, si les objectifs ne sont pas atteints, la rupture se présente comme la seule issue.
Le 5 de départ potentiel
- MJ : Luka Doncic
- A : Tim Hardaway Jr.
- AI : Dorian Finney Smith
- AF : Kristaps Porzingis
- P : Dwight Powell
Notre pronostic : 44-38 (7e)
Les Mavericks débutent une nouvelle ère avec Jason Kidd et Nico Harrison à la tête du navire — sans oublier Cuban en capitaine omnipotent. De jeunes matelots très talentueux, avec Doncic et Porzingis en tête de proue, pour faire avancer le plus loin possible le paquebot Mavs. La qualité de l’équipage est indéniable et devrait permettre au collectif une nouvelle fois de s’imposer en saison régulière. Mais attention, la profondeur de cet effectif reste somme toute limitée et pourra difficilement survivre à une blessure majeure.
Le nouveau commandant, fraîchement arrivé cet été, devra imposer sa patte et sa philosophie de jeu assez rapidement. Il sera intéressant de suivre la trajectoire de ce groupe et d’observer si des progrès sont réalisés, en espérant pour eux, cette fois-ci, qu’ils parviennent à contourner l’obstacle.
Photo de couverture : Tom Fox / Dallas News