Interview : Un fauteuil pour Steven

par Benjamin Moubeche

À seulement 18 ans, Steven a perdu l’usage de ses jambes. Après de nombreuses complications et une longue hospitalisation, il s’est trouvé une nouvelle passion : le basket. Très vite, il atteint un niveau qui lui permet de voir les choses en grand, mais il aura pour cela besoin d’un équipement adapté. Pour recueillir les 5000€ nécessaires à l’achat d’un fauteuil roulant adapté à sa pratique sportive, Steven se tourne vers Fabien, qui ouvre alors une cagnotte Leetchi. Mais très vite vient une grande surprise : Nicolas Batum – que l’on ne présente plus – et sa femme Aurélie décident de financer le fauteuil de Steven. Aujourd’hui, il a accepté de répondre à nos questions. Découvrez l’histoire de Steven, ses inspirations, et bien plus encore.

L’Analyste : Peux-tu nous raconter ton histoire et nous expliquer ton handicap ?

Steven : Je m’appelle Steven je suis tombé malade en juillet 2016, alors que j’étais en vacances. On ne savait pas vraiment ce que j’avais, je suis allé voir un médecin et ça n’a pas été un très bon contact. C’était un médecin remplaçant, il était assez énervé. J’avais certaines douleurs aux jambes qu’il ne voyait pas, c’était pas visible à l’œil nu, il aurait fallu m’emmener à l’hôpital dès ce moment, mais puisque je tenais encore debout, on m’a dit que ce n’était pas grave. Je n’ai pas eu de médicaments, rien. Le 31 juillet, je n’allais vraiment pas bien, on m’a emmené à l’hôpital, à Saint-Grégoire. On m’a fait des examens (scanner, IRM…) et le diagnostic n’était vraiment pas bon. On ne me l’a pas dit, ni à mes parents. Le soir même, j’ai demandé à ma mère de venir constater mon état, pour voir si j’allais bien. Et là j’ai remarqué des tâches qui commençaient à apparaître, je ne savais pas encore ce que c’était. Le 01 août j’ai été transféré à Pontchaillou. Et d’un coup : plus rien. Puis un coma artificiel pendant 15 jours. Je suis resté longtemps à l’hôpital et j’ai été amputé, au niveau des phalanges de la main et aux jambes.

Depuis quand joues-tu au basket ? Qu’est-ce qui te plaît dans ce sport ?

S : C’est un sport très technique. Le handibasket ressemble beaucoup au jeu des valides. On est en fauteuil et quelques choses changent mais c’est beaucoup plus ressemblant que d’autres sports.

Est-ce qu’il t’arrive de jouer avec des valides ?

S : Parfois oui. Je peux jouer debout avec mes prothèses, sur des terrains, pour faire un 3 contre 3 par exemple. Je ne joue pas aussi bien qu’eux, mais je me défend.

À quel poste joues-tu ?

S : Je n’ai pas encore trouvé. Je ne joue que depuis un an et demi, c’est encore récent, et en handibasket c’est totalement différent. En défense, pour suivre son adversaire ou lorsqu’il faut échanger de joueurs, il faut aller très vite. Les fauteuils sont larges et quand on se fait dépasser c’est terminé.

À quelle fréquence t’entraînes-tu ?

S : Je m’entraîne une fois par semaine avec mon équipe. Mais je m’entraîne aussi à tirer chez moi.

Est-ce qu’il y a des règles spécifiques au handibasket qu’on ne retrouve pas dans le basket traditionnel ?

S : Quelques-unes oui. Par exemple, j’ai le droit au lever de balle. Aussi, on pose le ballon sur nos genoux pour faire des double-pas, on a le droit à deux poussées avant de faire un « marcher ».

Combien coûte un fauteuil spécialement conçu pour le handisport ? Qu’a-t-il de différent d’un fauteuil ordinaire ?

S : Ça dépend des fauteuils et des marques mais c’est généralement assez cher. 3000€, 5000€, parfois plus. Ce qui différencie ces fauteuils c’est leur châssis bien difforme, adapté au sport pratiqué, et les roues en carrossage (inclinées) ce qui permet d’améliorer la maniabilité du fauteuil et de le piloter plus vite.

Comment as-tu vécu le geste de Nicolas Batum, qui a décidé de t’offrir ton fauteuil ?

S : J’ai trouvé ça juste énorme. C’est assez improbable, et assez émouvant. Il jouera en janvier à Paris, si on pouvait aller le rencontrer pour le remercier ce serait super.

Ma rencontre avec Steven. (Photo : Benjamin Moubeche/L’Analyste)

J’ai pu profiter de cette rencontre pour interroger Fabien Desrondiers, travailleur social à Rennes, qui a crée la cagnotte destinée à aider Steven. Fabien a décidé de fonder une association, Clutch, qui a pour but de financer des fauteuils pour des joueurs de handibasket comme Steven.

Fabien : C’est vraiment ma rencontre avec Steven qui m’a donné envie de me lancer là-dedans. Je suis un grand fan de basket depuis que je suis gamin, j’ai vu les finales de Jordan en direct quand j’étais encore tout jeune. J’ai toujours voulu m’investir dans le basket à ma manière et c’est l’histoire de Steven qui m’a donné l’idée d’aider les joueurs de handibasket à financer des fauteuils. J’en ai beaucoup parlé, pour savoir si c’était un véritable problème, et le cas de Steven en est un parmi tant d’autres. Les joueurs n’ont que très peu d’aides financières pour acheter un fauteuil adapté, alors que c’est un réel besoin. L’idée, c’est d’organiser différents événements, en commençant par, je l’espère, la diffusion de matchs NBA en direct avec une entrée payante qui pourrait participer au financement de ces fauteuils.

Twitter : @AssoClutch
Instagram : @AssoClutch

Est-ce que ça t’arrive de regarder des matchs de handibasket ? Selon toi, est-ce que le handisport est assez médiatisé ?

S : Je trouve que le handibasket n’est pas assez diffusé, même si ça commence à être plus connu. Il y a des vidéos sur YouTube mais il y en a très peu à la télé, sauf peut-être les championnats paralympiques, les championnats d’Europe ou le mondial. Je regarde toutes ces compétitions.

Est-ce que tu aurais un message à faire passer à nos lecteurs ?

S :  N’hésitez pas à suivre le handisport. Mon équipe, l’équipe de basket de Rennes, cherche de nouveaux sponsors pour qu’on puisse financer de nouveaux fauteuils et assurer les réparations. Je vous encourage à venir voir nos matchs à l’occasion !

Photo : Cristophe J.

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