On ne se le répétera jamais assez, mais que la planète NBA tourne vite… Cet été, les deux franchises de Los Angeles ont réalisé de grands coups sur la Free Agency 2019, au point de véritablement figurer comme les principaux prétendants à la succession des Toronto Raptors. Petit tour d’horizon sur un été qu’on pourra peut-être bientôt qualifier d’historique pour la Cité des Anges.
Commençons par les Clippers, Petit Poucet historique de la ville, qui n’a jamais connu un stade de compétition plus avancé que les demi-finales de conférence. En 2017, l’ère « Lob City » menée par Chris Paul et Blake Griffin prenait fin avec le départ du premier cité. En grand gentleman qu’il est, il eut la merveilleuse idée de quitter le navire via un sign-and-trade, qui permit aux Clippers de récupérer pas moins de 7 joueurs, parmi lesquels Patrick Beverley, Lou Williams et Montrezl Harrell. La contrepartie apparaissait alors plus quantitative que qualitative, en tout cas aux premiers abords. Quelques mois plus tard, alors que Griffin avait prolongé pour 171 millions sur 5 ans et que la saison en était à son tiers, il fut échangé contre Tobias Harris et Avery Bradley. On avait alors du mal à se projeter quant au futur de la franchise de Steve Ballmer. A l’été 2018, la franchise ne s’était pas qualifiée en Playoffs pour la première fois depuis 2011, et ils n’ont pas cherché à attirer les superstars ; alors que DeAndre Jordan faisait ses valises pour Dallas (on veut dire, vraiment cette fois-ci), Avery Bradley, Montrezl Harrell et Patrick Beverley rempilaient tandis que Marcin Gortat et Mike Scott arrivaient. Rien de bien excitant au premier abord, mais ces derniers n’avaient plus qu’un an de contrat et l’objectif paraissait alors clair : garder un maximum de flexibilité pour la Free Agency 2019.
Voilà donc l’exercice 2018/2019 qui commençait, et il fallait être bien audacieux pour imaginer cette équipe se qualifier pour les Playoffs dans une conférence Ouest plus relevée que jamais. Pourtant, emmené par un banc dont le leader n’était autre que le futur sixième homme de l’année 2019 en la personne de Lou Williams (20 points de moyenne par match à 42,5% et 5,4 passes), et un Montrezl Harrell qui aurait pu être dans les discussions de meilleure progression de la saison (16,6 points par match à 61,5%, 6,5 rebonds et 1,3 contres), les Clippers parvenaient à décrocher le 8ème spot qualificatif. Au premier tour face aux Warriors, ils arrachaient tout de même 2 victoires aux champions en titre, dont une particulièrement marquante grâce à un fabuleux comeback de 30 points et un Lou Will plus chaud que jamais. Doc Rivers et ses hommes ont fini par s’incliner 4 à 2 dans la logique des choses. Mais peu importe, la saison des Clippers était un véritable succès, ils ont montré que cette équipe avait une grande âme et un talent sacrément bien réparti.
Nous voilà donc à l’été 2019, et alors que KD et Irving ont rejoint les Nets, que le Jazz de l’Utah s’est renforcé avec Mike Conley et Bojan Bogdanvic, les Clippers sont encore bien discrets… jusqu’à ce 6 juillet en tout cas, jour où le Woj balance deux bombes comme lui seul en a le secret. Premièrement, l’autoproclamé « fun guy », Kawhi Leonard, qui vient d’emmener Toronto au premier titre de son histoire avec des Playoffs dignes de Michael Jordan, choisit de signer 4 ans chez les Clipps, lui qui était courtisé par les Lakers et, évidemment, Toronto. La deuxième annonce, beaucoup plus inattendue, mentionne un trade avec le Thunder d’Oklahoma : Paul George, qui a longtemps été dans les discussions pour le MVP 2019, rallie lui aussi sa ville natale, en échange de Shai Gilgeous-Alexander, Danilo Gallinari, 4 premiers tours de Draft non protégés, un premier tour protégé et deux échanges de tours. Ce serait ce transfert qui aurait convaincu le dernier MVP des finales de rejoindre les Clippers. Peu avant, c’est Patrick Beverley, un temps annoncé à Dallas ou Chicago, qui rempilait pour 3 ans et 40 millions de dollars, lui qui incarne à la perfection le fighting spirit de cette équipe.
Voilà donc les Clippers dotée d’une incroyable armada, avec un 5 majeur qui pourrait ressembler au suivant : Beverley – George – Leonard – Harrell – Zubac, une formation extrêmement dangereuse des deux côtés du terrain. Offensivement, Paul George tournait à 28 points par match l’année dernière à 43,8% au tir, 26,6 unités à 49,6% pour The Klaw. Mais ce qui fait le plus peur, c’est l’intelligence et la polyvalence de ces joueurs-là. La perspective de les voir partager la gonfle est tout bonnement magnifique. Kawhi a réussi à faire briller tout un collectif chez les canadiens, faisant du non drafté Fred Van Vleet un héros des finales, de Serge Ibaka l’intérieur imposant qu’on connaissait à Oklahoma, et de Kyle Lowry un Champion NBA (oui oui, quand même…). Paul George a lui réussi à briller aux côtés de Russel Westbrook, longtemps catalogué comme étant incapable de jouer avec d’autres stars. Ajoutez à cela le vécu d’un groupe qui aura réussit à garder la base de ce qui a fait son succès l’année passée, un coach qui a démontré plus d’une fois sa capacité à manager un groupe talentueux (notamment en remportant le titre avec les Celtics en 2008), un triple 6ème homme de l’année qui pensait à sa retraite avant de vivre une telle aventure avec cette équipe, un petit meneur capable de faire sortir les meilleurs adversaires de leurs matchs sur les rencontres les plus importantes, et vous obtenez la permission, si ce n’est l’obligation, de voir grand pour cette équipe. Surtout que défensivement, rien qu’entre Paul George, Kawhi Leonard et Patrick Beverley, ce sont 10 apparitions dans une All Defensive Team compilée au sein du même effectif. Réputée franchise de loosers depuis son déménagement à Los Angeles en 1984, ces Clippers là ont toute les cartes en mains pour changer la donne, et écrire une première page victorieuse à leur histoire.
Parlons maintenant de la franchise historique de la ville, les légendaires Los Angeles Lakers. Lors de l’intersaison 2018, les Purple & Gold ont réussi à attirer tout simplement le meilleur joueur du monde, LeBron James, qui signait alors pour 4 ans et 154 millions de dollars. Sauf que l’effectif construit autour de l’enfant de l’Ohio était…. intriguant. Fini les artilleurs à 3 points que furent Shane Battier, Mike Miller ou encore James Jones lors de son passage à Miami ; cette fois-ci, le Front Office des Lakers avait tenté de l’entourer de playmakers comme Michael Beasley, Rajon Rondo ou encore Lance Stephenson. Avant la saison, on se demandait comment tout ce beau monde allait pouvoir cohabiter, sans oublier la présence des jeunes draftés par la franchise et en développement comme Lonzo Ball, Kyle Kuzma, Josh Hart ou encore Brandon Ingram. Et le moins que l’on puisse dire, c’est que la saison fut un échec cuisant. Un échec car les Angelinos n’ont tout simplement pas réussi à se qualifier en Playoffs, comme chaque année depuis 2014 maintenant. Sauf que LeBron, lui, restait sur 8 finales NBA consécutives (4 avec les Heat, 4 avec les Cavaliers, ndlr) et 13 campagnes de Playoffs. Cela faisait donc une éternité que le King n’avait pas connu une intersaison aussi longue. Même si ce dernier a été blessé à l’aine après le All-Star break alors qu’à l’époque les Lakers étaient 4èmes de conférence, le constat reste le même : celui d’une non qualification et donc d’un échec. Dès lors, on pouvait s’attendre à du mouvement au sein de la franchise, et encore une fois on n’a pas été déçu.
Longtemps mentionné dans les rumeurs lors de la Trade Deadline 2018, l’ex-Pelican Anthony Davis, qui avait informé son front office de ses envies d’ailleurs et avait fait de la Cité des Anges sa destination favorite, a obtenu gain de cause ; Ainsi, le 17 juin dernier, Rob Pelinka envoyait Lonzo Ball, Josh Hart, Brandon Ingram et 3 premiers tours de draft, dont le 4ème de l’édition 2019, aux New Orleans Pelicans. Les Lakers ont donc marqué un premier grand coup, en attirant un des meilleurs intérieurs de la planète basket – si ce n’est le meilleur -, tout en gardant un Kyle Kuzma longtemps considéré comme le principal atout à faire valoir dans un trade. Cependant, les Lakers avaient désormais deux contrats max signés, et un effectif à constituer dans sa quasi-intégralité, la plupart des contrats signés l’été précédent étant d’un an. On apprenait quelques jours plus tard que le plus connu des monosourcils déclinait un bonus de 4 millions, et avec un trade pour se débarrasser de Moritz Wagner, Isaac Bonga et Jemerrio Jones, les Lakers se trouvaient en mesure d’offrir un nouveau contrat max. La question qui se posait était alors la suivante : Faut-il utiliser cet argent pour une seule star, ou le répartir sur plusieurs bons joueurs à des prix intéressants ?
Les premières rumeurs tournaient autour de la venue éventuelle de Kemba Walker, mais le meneur 3 fois All-Star a finalement choisi de rallier Boston et les Celtics. Ensuite, c’est la rumeur d’un retour de D’angelo Russell qui prenait de l’ampleur, avant que ce dernier ne soit tradé aux Warriors contre Kevin Durant dans un double sign-and-trade au max. Enfin, c’est Kawhi Leonard qui alimentait les rumeurs d’arrivées, mais ce dernier choisit finalement les Clippers.
Dès lors, tous les dominos ont commencé à tomber : le premier avec la signature du sniper champion 2019 Danny Green. Une signature à 30 millions sur 2 ans, qui apparaît un peu chère pour un joueur de 32 printemps. Mais l’arrière, qui tirait à 45,5% à trois points cette saison, fait partie de ces joueurs dont LeBron et A.D. ont besoin pour gagner, sachant que James a toujours mieux réussi lorsqu’il était entouré de tireurs. Le prix de cette signature sera par ailleurs vite amorti par les autres contrats que signeront les Lakers, pour la plupart très, très intéressants. Ainsi, Javale McGee prolongeait pour 2 an et 8,2 millions de dollars, une bonne affaire pour un double champion capable de prendre de la place dans la raquette et que LeBron a l’air de bien apprécier, tout autant que les fans. Ensuite, Kentavious Caldwell Pope, longtemps dans les rumeurs de trade pendant la saison, rempilait lui aussi pour 2 ans et 16 millions, encore un good deal pour celui qui apportait 11,4 points et 2,9 rebonds de moyenne à 43% au tir dont 34,7% à trois points en un peu moins de 25 minutes.
Juste après, l’ex meilleur pivot de la ligue et quadruple All Star Demarcus Cousins signait pour… 3,5 millions sur 1 an. Une excellente opération pour un joueur si dominant il y a un an et demi, avant sa rupture du tendon d’Achille. Encore plus intéressant quand on sait que ce dernier n’avait jamais été aussi fort et imposant que lorsqu’il jouait avec Anthony Davis, qui l’a convaincu de venir jouer à Los Angeles. Sortant de Playoffs décevant, où il s’était d’ailleurs de nouveau blessé légèrement au premier tour contre les Clippers, Boogie reste un pari plus qu’intéressant, et sans risque au vu de son contrat, pour n’importe quelle franchise. Ce dernier a d’ailleurs choqué pas mal de monde hors du terrain lors de son passage aux Warriors, se retrouvant à calmer le jeu entre Draymond Green et Kevin Durant lors de frictions entre les deux ex-coéquipiers (oui oui, Demarcus Cousins médiateur…) et en apparaissant dans une forme physique qu’on ne lui connaissait pas aux récentes conférences de presse. Cette bonne nouvelle accompagne la re-signature de Rajon Rondo, annoncée peu de temps après. Le champion 2008 avec les Celtics avait connu un sacré passage à vide depuis son départ de Boston, avec des expériences peu concluantes du côté de Chicago, Dallas ou encore Sacramento. Mais ce dernier avait retrouvé un peu de sa splendeur à la Nouvelle Orléans, lorsqu’il servait des caviars à… Demarcus Cousins et Anthony Davis. Le petit meneur a rempilé pour 2 saisons à 2,4 millions pour sa deuxième saison aux côtés du King. Ajoutez à cela Quinn Cook (40,5% à trois points), signé pour 6 millions sur 2 ans, Alex Caruso, à 5,5 millions sur deux ans et Avery Bradley (36,0% à trois points), signé 9,7 millions sur 2 ans aussi, et voilà un effectif compétitif. Défensivement, les Lakers devraient, avec leurs nouvelles recrues et un changement de coaching, connaître une progression radicale.
Avec deux des 10 meilleurs joueurs au monde, des champions comme Green Cook et McGee, des joueurs capables de s’effacer comme Carruso et Caldwell-Pope, un potentiel meilleur contrat de la ligue si DMC venait à retrouver même 60% de son niveau de jeu, et un équilibre bien réparti sur tout les postes, les Lakers peuvent se permettre de voir grand. D’autant plus que LeBron arrivera avec un couteau entre les dents et aura eu beaucoup de temps pour se préparer, entre deux tournages de Space Jam.
Dans une ligue plus ouverte que jamais, placée sous le sigle des duos et du renouveau avec une dynastie des Warriors qui appartient à 95% au passé, le trône de la grande ligue cherche preneur. Pour la première fois de l’histoire, les deux franchises de Los Angeles ont de véritables atouts à faire valoir. La NBA ne reprend que dans 2 mois et demi, mais on est déjà fous d’impatience de voir ces équipes new look évoluer, avec un derby Angelinos qui s’annonce des plus palpitants. Clippers ? Lakers ? Les deux équipes semblent capables de régner sur L.A. et sur la ligue. Mais, pour reprendre les mots d’un homme sage : à la fin, il n’en restera qu’un. Le 22 octobre, les deux équipes de la cité des anges ouvriront la saison dans un match à ne pas manquer.
Photo : Hans Gutknecht, Los Angeles Daily News